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Les entrepreneurs du bâtiment sont las

La plupart des métiers de la construction sont sévèrement impactés par la crise du logement. Didier Massy, le président de la Fédération landaise du bâtiment (670 adhérents) ne veut pas « jouer les Cassandre », mais parle de « moral en berne » et « d'année de combat ».

Batiment

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La forte participation des représentants de l’État et des élus landais à la présentation des vœux 2024 de la fédération « porte-parole du bâtiment » peut être vue comme un hommage à son dynamisme ou comme une volonté de se porter au chevet d’un malade. La vérité est certainement entre les deux. De fait, Didier Massy, connu pour sa capacité à garder le sourire dans l’adversité, n’a pas caché son amertume. « Inquiétude, lassitude, doute, baisse, tous ces mots parlent bien de nous », a-t-il indiqué avant de préciser : « Les derniers chiffres de fin novembre 2023 font état d’une chute de presque 24 % des déclarations d’ouverture de chantier de logements neufs au cours des 12 derniers mois par rapport à l’année précédente, d’une diminution de 11,5 % des déclarations d’ouverture de chantier de locaux non résidentiels et une chute vertigineuse de 62 % par rapport au même trimestre de l’année 2022, des mises en vente de logements neufs aux particuliers dans les Landes sur le troisième trimestre. »

Didier Massy et Sébastien Perruchot batiment

Didier Massy et Sébastien Perruchot © H. R.

43 % de défaillances d’entreprises

Une situation corroborée par l’analyse de Sébastien Perruchot, directeur de CERC Aquitaine (Cellule économique régionale de la construction) qui lors du point de conjoncture a rappelé que dans les Landes, le bâtiment compte presque 12 000 salariés pour 4 261 établissements. Avec un chiffre d’affaires global d’1 milliard d’euros, dont 57 % en entretien et rénovation de bâtiment, 28 % en construction neuve de logements et 15 % en construction neuve de locaux. Les chiffres du spécialiste font également apparaître sur les 12 derniers mois « un décrochage de l’ordre de 36 % des ouvertures de chantiers et des permis de construire ».

Parmi les explications, on trouve « la remontée des taux des emprunts qui bouleverse la donne pour l’acquisition de biens immobiliers » et la hausse des produits de construction. Spectaculaire notamment l’évolution, sur les 24 derniers mois, du prix des tuiles (+ 46 %), des matériaux d’installation électrique (+ 21 %) ou des charpentes bois et menuiserie (+ 20 %). « Et certains entrepreneurs n’ayant pas voulu faire supporter ces hausses à leurs clients, se sont retrouvés en difficulté », dénonce Didier Massy. Au bilan, pour ces raisons et pour d’autres, les carnets de commandes ont fondu, il a fallu rembourser les Prêts garantis par l’État (PGE) et les défaillances se sont multipliées (56 soit + 43 %) surtout dans les entreprises de 10 à 20 salariés et le nombre de licenciements a également bondi de 68 %.

Rester optimiste

Le premier de cordée, Didier Massy, s’attache cependant à voir quelques points positifs : la commande publique des agglomérations et des communes « qui va nous sortir d’affaire », les travaux imposés aux propriétaires par les diagnostics de performance énergétique (DPE), les 4 milliards d’euros injectés par l’État à travers l’aide MaPrimeRénov’, le label RGE (reconnu garant de l’environnement) « qui nous tire vers le haut » et « la chance d’être dans un département en pleine expansion démographique et de voir le développement de la construction s’éloigner de la côte pour aller vers l’intérieur des terres ». Il appelle de ses vœux « la baisse des taux, la normalisation de l’inflation et une loi Logement qui viendraient redynamiser un marché qui a besoin d’être restructuré ».