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Rugby : Le Stade Montois à l’épreuve

Mis à mal par la crise de la Covid-19, le club de Mont-de-Marsan, au fond du classement du championnat de Pro D2, fait face à de nombreuses difficultés. Mais, loin de baisser les bras, les Jaune et Noir restent confiants et solidaires. Un état d’esprit encouragé par leur président Jean-Robert Cazeaux au moment de dresser le bilan d’une année 2020 complexe pour le monde de l’Ovalie.

Stade Montois Rugby Mont-de-Marsan

Stade Montois © Cyrille VIDAL

Les Annonces Landaises : Depuis presque un an, la crise sanitaire et les deux confinements ont largement perturbé la vie des clubs sportifs professionnels. Dans quel état d’esprit se trouve aujourd’hui le Stade Montois ?

Jean-Robert CAZEAUX : Comme tous les clubs, nous avons dû faire preuve d’adaptabilité face aux contraintes de la crise sanitaire. Au printemps dernier, la saison s’est terminée prématurément, ce qui a été assez impactant pour notre club tant sportivement que financièrement.

Jean-Robert CAZEAUX © D. R.

En septembre, nous avons redémarré le championnat avec beaucoup d’incertitudes, sans savoir notamment si on allait pouvoir jouer la saison dans des conditions normales. Rapidement, il y a eu des matchs reportés, en raison de cas de Covid dans plusieurs clubs. Puis, à son tour, le Stade Montois a été touché de plein fouet avec une trentaine de cas positifs. 2020 a été une année compliquée. Pour les joueurs, il a été difficile de rester concentrés sur l’objectif de la performance.

 

LAL : Récemment vous avez déclaré que « le rugby professionnel serait en danger de mort en cas de nouvel arrêt ». À quelles difficultés fait aujourd’hui face le Stade Montois ?

J.-R. C. : Nous sommes une entreprise à part entière. Et comme pour toutes les entreprises, la gestion de la crise est complexe et anxiogène. La saison dernière, l’impact économique a été majeur car nous avons perdu des ressources de notre plan budgétaire. Nous y avons pallié en faisant notamment des efforts de restructuration, avec une baisse de notre masse salariale. C’était indispensable pour pouvoir redémarrer une saison dans des conditions budgétaires raisonnables. Nous avons eu également recours à des Prêts garantis par l’État (PGE) afin de compenser les pertes de la saison passée et celles, éventuelles, de la saison en cours.

Le Stade Montois a été touché de plein fouet avec une trentaine de cas positifs.

© Cyrille VIDAL

Le rugby est une discipline sportive largement soumise à l’intérêt économique des partenariats. Pour un club comme Mont-de-Marsan, les partenariats d’entreprises représentent 60 % du budget. Nous savions que nos partenaires allaient être, eux aussi, impactés par la crise et nous savions que nous n’obtiendrions pas de ces entreprises le même soutien financier. Avec la Ligue nationale de rugby (LNR) et l’organe de contrôle de la Ligue (la DNACG), nous avions projeté une baisse de 30 % de nos ressources, aussi bien au niveau de la billetterie que des partenariats pour la saison 2020-2021. Et nous ne nous sommes pas trompés. Quand on parle de danger de mort du rugby professionnel, c’est une réalité.

 

LAL : Comment ont évolué vos relations avec vos partenaires ?

J.-R. C. : Les relations avec nos partenaires restent excellentes parce que nous travaillons avec ces entreprises, nous sommes à leur écoute. Elles ne nous ont pas lâchés. Au contraire. Nous sommes attentifs à leurs soucis et nous traversons ce moment difficile avec elles. La saison dernière n’a pas été à son terme, donc nous n’avons pas pu honorer toutes les prestations que nous devions servir à ces partenaires. Il a fallu trouver des compensations, proposer des solutions.

 

LAL : Grâce à quels dispositifs, l’État vous aide-t-il à passer ce cap difficile ?

J.-R. C. : Le rugby professionnel va percevoir une aide de 40 millions d’euros à répartir entre tous les clubs en fonction des pertes réelles induites par les baisses de jauges à 5 000 personnes pour l’accueil du public. Même si cela ne couvrira pas toutes les pertes, ce sera une vraie bouffée d’oxygène pour les clubs. En parallèle, nous bénéficions de l’exonération des charges patronales pour les salaires des mois d’octobre, novembre et décembre. Cette mesure va également permettre d’attendre des jours meilleurs et un redémarrage normal avec du public dans les stades.

Nos partenaires ne nous ont pas lâchés. Au contraire.

© Cyrille VIDAL

LAL : Depuis plusieurs semaines, le championnat de Pro D2 se joue à huis clos. Qu’est-ce que cela induit pour vos joueurs ?

J.-R. C. : Sur le plan de la préparation physique, cette contrainte ne change pas grand chose pour les joueurs. En revanche, pour les matchs, sans le public, il manque le 16e homme. C’est indéniable. Le public est un soutien important. Sa présence a un réel impact psychologique sur la motivation des joueurs. On cherche toujours à se surpasser face à ses supporters. Quand on joue devant son public, il y a un complément d’âme qui aujourd’hui fait défaut. Cette saison, on constate d’ailleurs qu’il y a plus de matchs remportés à l’extérieur que dans une saison normale.

 

LAL : Quel protocole a été mis en place afin de pouvoir jouer tout en respectant les mesures sanitaires ?

J.-R. C. : Depuis le mois de juin, avec la Ligue et un comité d’experts, nous avons mis en place un protocole très strict pour protéger nos joueurs mais aussi les autres équipes. Par exemple, dès que nous avons trois cas positifs sur sept jours glissants, nous sommes contraints de mettre tout le monde à l’isolement pendant huit jours. Nous faisons également travailler les joueurs par petits groupes pour limiter les risques. Et nous sommes testés toutes les semaines, trois jours avant chaque match. Cela concerne l’ensemble du personnel, y compris le personnel administratif, les dirigeants et le président du club. Grâce à ce protocole, réalisé en accord avec le ministère des Sports, nous avons pu continuer à jouer. Ce qui n’a pas été le cas pour tous les sports.

Il y a encore deux tiers de la saison à jouer. Nous restons confiants et solidaires.

LAL : Sportivement, la saison 2020-2021 n’a pas débuté sous les meilleurs auspices. Mais après une série de défaites, le réveil du Stade Montois semble toutefois amorcé. Quels ont été les ingrédients de ce sursaut ?

© Cyrille VIDAL

 

J.-R. C. : Les circonstances du début de saison n’ont vraiment pas été favorables. Quand on dit à un joueur, qui s’est préparé pendant une semaine, que finalement il ne va pas jouer, et qu’on ne sait pas quand il pourra rejouer ni dans quelles conditions, c’est assez perturbant. Cela a indéniablement joué sur les performances. Il y a eu aussi certains matchs au cours desquels nous n’avons clairement pas été bons. Et puis nous avons un groupe jeune qui est en reconstitution et un nouveau staff qui avait besoin de prendre ses marques. Nous avons commencé à redresser la barre, conscients de nos forces et convaincus que nous ne sommes pas à notre place au fond du classement. Face à Rouen et Biarritz, les joueurs ont montré qu’ils avaient de l’âme et ils ont fait plutôt belle figure sur le terrain. Il y a encore deux tiers de la saison à jouer, nous restons confiants et solidaires.

 

© Cyrille VIDAL

LAL : Quelles sont vos attentes pour 2021 ?

J.-R. C. : Nous sommes dans l’expectative, pendus aux décisions du gouvernement et à l’évolution de la crise sanitaire. Je pense cependant que les gens ont besoin de sortir de chez eux, de se divertir, de passer de bons moments et quoi de mieux que de venir au stade pour soutenir son équipe ? J’espère que le public va rapidement retrouver le chemin des stades et ainsi stopper l’hémorragie financière qui nous touche et qui touche l’ensemble des clubs de notre championnat.