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Le kiwi face aux inondations

Haut lieu de la culture du kiwi, le canton de Peyrehorade est confronté à des inondations à répétition qui affaiblissent, voire détruisent les vergers.

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Les fortes pluies sont devenues le pire ennemi des kiwiculteurs du canton de Peyrehorade. Dans le bassin de production du kiwi de l’Adour, elles sont souvent synonymes de crues de l’Adour et des Gaves. En un mois, ils ont dû y faire face à deux  reprises.  Du 9 au 11 décembre 2021, la conjonction de fortes précipitations et de la fonte neigeuse sur les Pyrénées a impacté les communes de Peyrehorade, Oeyregave, Hastingues, Orthevielle et Sorde-l’Abbaye. L’eau a alors atteint 5,52 mètres. Idem du 9 au 11 janvier derniers, où l’eau est montée jusqu’à 5,10 mètres.

Ces deux épisodes s’ajoutent à la longue liste des inondations auxquelles la zone est confrontée. « Par rapport aux années 1980, la pluviométrie a augmenté de 200 millimètres par an, note Philippe Maisonnave, président du canton pour la Fédération départementale des syndicats d’exploitants agricoles (FDSEA). On enregistre des épisodes de pluie importants sur des périodes assez courtes qui entraînent régulièrement la crue des cours d’eau. »

À chaque fois, le scénario est le même. Les kiwiculteurs doivent débarrasser les parcelles des dépôts de limon, de bois et de déchets divers charriés par les eaux. Il arrive aussi que certains arbres soient arrachés. Mais ce que les producteurs craignent le plus reste l’asphyxie des vergers. Dans ces sols de limon où le drainage naturel n’est pas très efficace, le poids de l’eau provoque des zones de tassement. Le système racinaire des arbres est alors endommagé et dès les premiers pics de chaleur, certains montrent des signes de dépérissement. Ils se caractérisent par des baisses de vigueur évoluant généralement jusqu’à la mort de l’arbre.

« Les premiers cas sont apparus à partir de 2015-2016 avant de se multiplier, indique Philippe Maisonnave. Aujourd’hui, le phénomène s’étend sur une zone qui va de Sorde-l’Abbaye à Guiche (Pyrénées-Atlantiques). » Selon le Bureau national interprofessionnel du kiwi (BIK), une centaine d’hectares a ainsi brutalement dépéri en 2020. Et depuis deux ans, les pertes de production sont importantes.

En 2020, alors qu’une centaine d’hectares de kiwi avaient brutalement dépéri, les producteurs avaient implanté une bannière exprimant leur désarroi sur le rond-point du kiwi à Peyrehorade © C. A.

RECHERCHES EN COURS

Pour essayer de comprendre les causes du phénomène et trouver des solutions de remédiation, le BIK a engagé l’année dernière un travail de thèse qui doit s’étendre sur trois ans. L’objectif est de déterminer les solutions agronomiques efficaces pour restaurer la qualité des sols et les bonnes pratiques culturales à recommander pour éviter le dépérissement. Une étude sur de nouveaux porte-greffes, résistants à des sols plus lourds, est également en cours de construction.

De fin mars à septembre, la Scaap Kiwifruits de France, coopérative réunissant 200 producteurs, lancera sa propre étude. Grâce à un étudiant stagiaire, elle souhaite mener des travaux d’expérimentation au sein des vergers pour valider les causes du dépérissement et trouver des solutions agronomiques pour limiter les mortalités et permettre des replantations dans ces zones.

Même si ces travaux nécessitent du temps, les kiwiculteurs espèrent de premiers résultats dans le courant de l’année. Avec un quart de la production nationale, le bassin de l’Adour représente aujourd’hui le plus grand terroir kiwicole de France et fait vivre quelque 350 producteurs.