Couverture du journal du 20/04/2024 Le nouveau magazine

INTERVIEW – Philippe Mouhel : « Notre force, la nature »

Plan local d’urbanisme, développement économique, schéma vélo, stratégie touristique… Le président de la communauté de communes Côte Landes Nature et maire de Castets, Philippe Mouhel, fait le point sur les grands sujets du territoire.

Philippe Mouhel, communauté de communes Côte Landes Nature

PHILIPPE MOUHEL Président de la communauté de communes Côte Landes Nature © Bernard Dugros

Les Annonces Landaises : Quelles sont les spécificités de la communauté de communes Côte Landes Nature ?

Philippe Mouhel : La « com com », créée en 2001, est issue du canton de Castets à l’époque. Avec ses 10 communes entre forêt et océan, notre territoire a ceci de spécifique qu’il est très étiré entre le nord et le sud, entouré d’autres communautés de communes importantes, comme Mimizan, Maremne Adour Côte Sud et le Grand Dax, très proches de nos communes. Ceci peut parfois poser quelques soucis, notamment dans la politique jeunesse, avec des élèves qui vont dans des collèges en dehors de Côte Landes Nature.

Ici, chaque maire, de gauche, de droite, du centre, a une vice-présidence, et on travaille tous ensemble, ce n’est pas toujours facile, mais ça tient en se respectant les uns les autres.

Pour fêter les 20 ans de Côte Landes Nature l’an passé, nous avons réuni les anciens élus et présidents, ça a été l’occasion de voir le chemin parcouru, de par la loi qui nous a imposé des compétences, mais aussi par la volonté des élus, notamment sur la compétence tourisme et développement économique prise en 2018.

 

LAL : Vous êtes à mi-mandat, quel premier bilan dressez-vous ?

Philippe Mouhel : Je baigne dans la « com com » depuis longtemps, comme conseiller communautaire depuis 2007 et maire de Castets depuis 2014. J’ai été sur la précédente mandature, vice-président au côté de Gérard Napias auprès de qui j’ai beaucoup appris.

Sur la première partie du mandat, nous avons été percutés par le Covid qui a impacté les collectivités locales. Nous avons donc beaucoup misé, avec le centre intercommunal d’action sociale (CIAS), sur l’accompagnement des personnes. Ce début de mandat nous a aussi permis d’avancer sur différentes études, comme l’extension des locaux de la communauté de communes, préférée à une nouvelle construction plus onéreuse. Nous sommes désormais dans la phase de réalisation. Le nouveau siège, livrable en 2024, va permettre d’accueillir tous nos agents du CIAS, de l’enfance-jeunesse, le service rénovation énergétique qui marche extrêmement bien auprès des habitants et le conseiller numérique. Avec ces nouveaux services et la création de l’espace France Services sous la houlette du vice-président Jean-Jacques Leblond, la masse salariale est passée de 1,2 million à 1,6 million d’euros, il fallait que nous nous agrandissions pour être plus à l’aise et mieux travailler au service des habitants.

Trois hôtels d’entreprises devraient voir le jour, à Saint-Julien-en-Born et Léon dans les deux ans, et à Castets un peu plus tard

Lévignacq

Le village de Lévignacq et ses maisons landaises © ALPI

 

LAL : Un des gros dossiers du moment est la création du plan local d’urbanisme intercommunal (PLUi)…

Philippe Mouhel : Actuellement, nous avons 10 règlements différents sur 10 communes, une maison déposée à Castets n’est pas soumise aux mêmes règles qu’une à Linxe. Nous travaillons à l’harmonisation de tous ces règlements, c’est un gros chantier avec 132 réunions prévues au total. Nous avons voté le 26 juin, le projet d’aménagement et de développement durable (PADD) débattu dans les 10 communes ce printemps. L’objectif très ambitieux est d’avoir un PLUi opposable fin 2024 ou début 2025, après enquête publique.

Il s’agit aussi de réfléchir ensemble au développement des zones d’activité, les grosses avec de gros volumes en bord d’échangeur à Castets, les plus petites artisanales, plus près de la côte. Il peut y avoir des égoïsmes communaux où chacun voudrait le maximum, mais par toutes ces réunions, on comprend mieux les intérêts des uns et des autres et les intérêts communs. Je voudrais saluer Gilles Ducout, vice-président à l’urbanisme et maire de Saint-Julien-en-Born, et notre agent Élodie Houillier, responsable de l’urbanisme, qui mènent ce dossier.

Nous avons aussi entamé le gros dossier du PLH (programme local de l’habitat), cela nous oblige à réfléchir aux logements sociaux, en fonction de la taille et des services présents dans nos communes. Il faut en développer dans des communes où les gens travaillent et ont du mal à se loger.

On va également attaquer la révision du schéma de cohérence territoriale (SCoT) qui servira au PLUi2. Nous menons un travail très important avec le maire de Lévignacq, Jean-Claude Caule, sur la charte patrimoniale qui sera mise à disposition de la communauté de communes pour identifier partout des zones, des quartiers, des bâtiments à préserver. Notre territoire évolue, et nous voulons continuer à attirer, tout en préservant l’environnement. La nature, c’est notre force, il nous faut communiquer dessus et l’accompagner pour la préserver, il n’y a pas de débat là-dessus.

 

LAL : Qu’en est-il des friches industrielles ?

Philippe Mouhel : À Linxe, sur le site de l’ancienne usine Darbo de panneaux de bois fermée en 2016, la communauté de communes accompagne la transformation de cette friche pour un mix entre habitat, activités de loisirs, tourisme et photovoltaïque. Le dossier a été confié au groupe béarnais Essor et devrait voir le jour en 2025.

Du côté de Castets, sur la friche Gascogne, c’est leur propriété, ce sont eux qui vont décider. Mais dans le PLUi, on va pouvoir dessiner sur la carte ce qui est possible d’y faire entre habitat et activités. On ne fait qu’accompagner et dire, par le crayon, ce qu’on autorise ou pas.

 

LAL : En termes de développement économique, quelles nouveautés ?

Philippe Mouhel : Avec notre chargé de mission à mi-temps au pôle développement économique, nous avons réussi à terminer les ventes des terrains sur Linxe et Lit-et-Mixe. Nous faisons une extension de la zone de Saint-Julien-en-Born avec du petit artisanat pour la commercialiser d’ici la fin d’année. Une nouvelle zone aussi à Léon avec des commerces discount et de bricolage. À Castets, nous avons fini de vendre les terrains sur la zone de Lesté, un gros logisticien va commencer à construire ; et d’autres terrains sont viabilisés côté McDonald’s. Nous accompagnons la dynamique économique.

Nous souhaitons aussi avec Karine Dasquet, vice-présidente à l’économie, créer un pôle de bouche artisanal avec des producteurs et artisans du coin qui font dans le bio et la conserverie locale avec une boutique au niveau de l’échangeur. Enfin, autre nouveauté, trois hôtels d’entreprises devraient voir le jour, à Saint-Julien-en-Born et Léon dans les deux ans, et à Castets un peu plus tard, afin d’accompagner des artisans qui n’auraient pas les moyens de créer leur propre bâtiment, via un système de location.

 

LAL : La future micro-crèche publique à Castets sera-t-elle implantée au cœur de la zone d’activité ?

Philippe Mouhel : C’est un bel investissement qui manquait sur notre territoire, même si on a déjà un relais petite enfance qui fonctionne bien et des crèches privées. La micro-crèche avec 12 lits, sera livrée fin 2024 à Castets, soit dans le centre-ville soit près des zones d’activités, notre idée est de la mettre au plus près de là où les habitants vont travailler, le lieu sera décidé cet été grâce au travail de la vice-présidente, Claire Luciano et ses équipes. Les 500 000 euros de coût seront subventionnés à 60-70 % par la Caf, l’État et le département.

Côté jeunesse, je voudrais aussi mettre en avant l’aide au permis mise en place par la communauté de communes : 200 euros qui se cumulent avec l’aide du département, contre des heures de bénévolat dans nos associations. On accompagne nos jeunes dans la mobilité, la voiture est hyper nécessaire ici pour sortir, travailler, faire du sport…

 

Côte Landes Nature et Tourisme

© Sophie PAWLAK

 

LAL : Où en est le plan vélo ?

Philippe Mouhel : Si l’entretien des voiries reste une priorité avec en moyenne 800 000 euros annuels dédiés, nous mettons aussi l’accent sur le Schéma vélo travaillé par le vice-président, Didier Clavery, et voté en juillet 2022 après un an d’études. Des moyens énormes (3 millions d’euros) sont mis sur la table d’ici la fin du mandat. De 100 km de pistes cyclables, on va passer à 200 km sur 10 ans. Nous sommes en train de relier un quartier de Léon à la Vélodyssée en évitant la départementale. Pour celle qui reliera Lit-et-Mixe et Saint-Julien-en-Born, nous avons désormais l’accord de tous les propriétaires privés chez qui la piste doit passer – un travail dans la dentelle – avec l’objectif de commencer les travaux fin 2023, début 2024. Vers Linxe ou Saint-Michel-Escalus aussi, on déploie le maillage. On avait réalisé jusqu’ici un réseau pour les touristes, on poursuit désormais le réseau pour les habitants, le tout en partenariat avec le département, la région et les communes voisines. C’est un travail colossal.

 

LAL : Quelles autres actions estampillées développement durable ?

Philippe Mouhel : Nous avons un dispositif dédié aux collectivités locales, avec des appels à manifestation d’intérêt sur du panneau solaire vers l’autoconsommation et la revente directe. On peut ainsi couvrir les tennis de Linxe, le boulodrome de Léon, des parkings à la plage… On accompagne les communes sur l’ingénierie.

Nous avons aussi mis en place une mutualisation des matériaux sous la houlette de Jean Mora, vice-président. La mini-pelle de Castets, utilisée une semaine par an, a par exemple été mise à disposition des autres communes. On fait ainsi tous des économies en achetant moins de matériels.

Nous proposons aussi, depuis l’an dernier, des visites dans les maisons des particuliers pour la rénovation énergétique, il y a un vrai investissement de la collectivité sur ce sujet.

Nous menons également des actions avec le service enfance- jeunesse pour sensibiliser au développement durable avec des interventions en classe et le programme « Watty à l’école », labellisé par le ministère de la Transition écologique. Le festival Éco des Pins, les 8 et 9 juillet prochains à Léon, vient clore l’année scolaire avec de nombreuses animations pour tous (cinéma en plein air, concerts, conférences, etc.).

Un projet touristique pourrait être étudié au château de Lévignacq. Et pourquoi pas des « navettes des terres » pour emmener des gens du littoral vers nos villages intérieurs ?

Contis,

Au-delà des plages comme ici à Contis, Côte Landes Nature veut capitaliser sur le rétro-littoral © ALPI

 

LAL : En quoi consiste la nouvelle stratégie touristique de Côte Landes Nature ?

Philippe Mouhel : Nous venons de recevoir l ’étude commandée à Emotio Tourisme, un cabinet d’études et de conseil spécialisé en tourisme, loisirs et patrimoine. Nous n’avons pas de Tour Eiffel, mais plusieurs sites remarquables ! Il nous faut faire une force de ces sites naturels et patrimoniaux, du courant de Léon au phare de Contis, en travaillant aussi sur le rétro-littoral. Nous pensons notamment à un projet touristique sur le château de Lévignacq dont la communauté de communes pourrait devenir propriétaire pour s’inspirer du château de Laas (Béarn), avec un parcours ludique et pédagogique, entre escape game et cabanes dans les arbres. En gros, le cabinet nous dit : « Votre littoral sature, faites venir des gens dans vos terres, avec un beau pôle d’attractivité. » Nous allons discuter de tout cela pour prendre les bonnes décisions ensemble.

Après les navettes des plages gratuites pour les habitants et touristes (130 000 euros d’investissement depuis 2014 et 50 000 voyageurs), nous réfléchissons aussi à mettre en place des « navettes des terres » pour emmener des gens du littoral dans nos villages où il y a aussi de belles choses à voir et à faire.

En tout cas, nous élargissons déjà les ailes de saison, en accompagnant la surveillance d’une plage du 1er mai au 30 septembre. Les familles viennent, les commerçants remplissent leurs terrasses, c’est du gagnant-gagnant. Et nous participons aussi au dispositif Nomad pour l’emploi, l’accompagnement et le logement des saisonniers.

On avait réalisé jusqu’ici un réseau cyclable pour les touristes, on poursuit désormais le réseau pour les habitants

LAL : Après l’échec du projet de piscine à vagues porté par un privé à Castets, qu’en est-il d’une éventuelle piscine intercommunale ?

Philippe Mouhel : Nous sommes en réflexion sur le sujet. Une piscine, c’est un gros investissement et un lourd budget de fonctionnement avec des déficits annuels. Nous regardons de près des nouveautés comme un camion-piscine à l’investissement moindre pour apprendre aux scolaires à nager. Et pourquoi ne pas se servir des piscines existantes dans des campings avant et après la saison ? Ce mandat servira à étudier des possibilités.

 

LES 10 ANS DE L’OFFICE DE TOURISME INTERCOMMUNAL

L’anniversaire a été célébré le 1er juin au château Belle Époque à Linxe. Et pour fêter ces 10 ans, une grande première aura lieu cet automne : un raid multisport Aventure en Côte Landes Nature. Entre pistes cyclables, forêt, plage et courants en canoë, un beau défi sportif de 55 km s’annonce le 7 octobre, au départ du stade de Vielle-Saint-Girons.

www.aventureencotelandesnature.fr

CÔTE LANDES NATURE EN CHIFFRES

10 communes : Castets, Léon, Lévignacq, Linxe, Lit-et-Mixe, Saint-Julien-en-Born, Saint-Michel-Escalus, Taller, Uza, Vielle-Saint-Girons

40 salariés, 29 élus

12 093 habitants sur 607 km2 de territoire (90 % de couverture forestière)

Budget : 17,7 millions d’euros en fonctionnement et 12 millions d’euros en investissement dont 2,1 millions d’euros pour l’acquisition foncière et les hôtels d’entreprises, 1,6 million pour l’extension du siège de la communauté de communes, 1,2 million pour la voirie, 1,1 million pour les voies vertes, 600 000 euros pour la micro-crèche, 350 000 euros pour le plan plage…

2 300 acteurs économiques

108 emplois pour 100 actifs résidant dans la zone (contre 93,2 dans les Landes et 98,9 en Aquitaine)

30 % d’emplois industriels contre 15 % au niveau du département