Couverture du journal du 30/05/2025 Le nouveau magazine

Guérard, Coussau : vendanges de chefs

À eux deux, Michel Guérard*** et Jean Coussau** cumulent cinq étoiles depuis des décennies, dans leurs cuisines d’Eugénie-les-Bains et Magescq. Leur amour commun du vin, comme du bon pain, les a poussés à cultiver, chacun, leur propre vigne. Et le millésime 2022 s’annonce assez exceptionnel.

vendanges

© J. D.

Quand Christine Barthélémy voulut acquérir le château de Bachen, en plein cœur du Tursan landais, le notaire répondit à l’héritière de la Chaîne thermale du Soleil, qu’en étant « femme, non mariée », jamais elle ne pourrait l’avoir. « Quand je suis venu dans les Landes, dans les années 1970, elle m’a amené à Bachen en me demandant ce que je pensais de ce petit manoir. En fait, elle me testait, confie Michel Guérard. Je l’ai rapidement informée que si nous devions l’acheter – nous n’avions pas beaucoup d’argent à l’époque -, nous y mettrions de la vigne. C’était peut-être une folie de ma part… »

J’ai compris que quelque part, un œnologue était un cuisinier, c’est une histoire de terroir, de mélanges qui débouchent sur des goûts

À une dizaine de minutes d’Eugénie-les-Bains, le château va devenir la résidence du couple et le lieu d’expérimentation du vin du cuisinier qui avait auparavant réussi à faire venir le Tout-Paris dans son restaurant d’Asnières, le Pot-au-Feu, où il inventa sa célèbre salade folle aux copeaux de foie gras en vinaigrette. De cette époque, il garde encore un magazine aux feuilles jaunies, « Tout à vous », avec une photo de lui en toque blanche derrière le bar de son bistrot francilien, faisant tourner un vin rouge dans un ballon, devant son ami Serge Féchant qu’il remercie encore de lui avoir fait découvrir une multitude de vins inconnus.

Michel Guérard vendanges

Michel Guérard © J. D.

 

50 000 BOUTEILLES PAR AN CHEZ GUÉRARD

Installé dans les Landes, « j’avais des amis de Bordeaux qui venaient comme clients. Avec la famille Moueix [Pétrus à l’époque, NDLR], j’ai rencontré leur œnologue, Jean-Claude Berrouet, et en même temps Denis Dubourdieu, un spécialiste en blanc, qui m’ont conseillé ici ». Pendant sept mois, tous les samedis matin, Michel Guérard se rend à l’Institut d’œnologie de Bordeaux, et enrage aujourd’hui de ne plus retrouver ses cahiers de leçons. « J’ai compris que quelque part, un œnologue était un cuisinier, c’est une histoire de terroir, de mélanges qui débouchent sur des goûts. Cela a influencé ma manière de faire de la cuisine. Les cuisiniers devraient savoir faire le vin comme le pain. Cela ajoute à certains de nos réflexes : il faut changer, surprendre, séduire, comme sur une carte de restaurant. Et puis, j’avais aussi envie d’encourager les vignerons d’ici, j’étais intervenu auprès du président de l’Ina…