Couverture du journal du 20/04/2024 Le nouveau magazine

Conjoncture : « Ralentissement, mais bonnes nouvelles »

Jean-Marc Laborie, directeur départemental des Landes à la Banque de France, a présenté le 20 février à la chambre de commerce et d’industrie des Landes, l’enquête annuelle sur les entreprises en Nouvelle-Aquitaine *.

© J. D.

Les Annonces Landaises : Globalement, comment qualifier la conjoncture ?

Jean-Marc Laborie : Le ralentissement de l’économie néo-aquitaine est le maître-mot pour 2023, résultante des crises liées aux tensions géopolitiques (Ukraine, Proche-Orient), à l’inflation et à la baisse de la consommation induite. L’économie a besoin de stabilité de faire des plans sur l’avenir. Pour 2024, les perspectives sont un peu limite en termes de croissance, mais il y a de bonnes nouvelles par sous-secteurs. On espère aussi que l’épargne constituée après Covid, va revenir dans la consommation pour soutenir la croissance et que les discussions entre grande distribution et industriels vont jouer dans la baisse des prix alimentaires et participer à une moindre inflation.

LAL : Quels sont les grands enseignements de votre enquête ?

J.-M. L. : Dans le secteur de l’industrie, le chiffre d’affaires 2022 avait été marqué par une belle progression (+ 4,3 %), 2023 a été « flat » (+ 0,4 %) et les projections 2024 sont plutôt favorables à 4,1 %, les entreprises sont encore optimistes. Par secteur, le matériel de transport avec notamment les moteurs de Safran par la reprise du trafic aérien, est en forte hausse, les besoins sont énormes. Mais les évolutions sont très contrastées selon les filières. Sur les autres produits industriels (API), on note un recul net du chiffre d’affaires. C’est notamment le cas sur l’industrie du papier carton et de la chimie qui ont de grands représentants dans les Landes. Moins de consommation, c’est moins de vente sur internet, donc moins de cartons et moins de palettes…

Globalement, les investissements sont plutôt prévus sur de la maintenance ou du renouvellement que sur de la capacité ou du changement technologique, dans les Landes et ailleurs dans la région.

Du côté des services marchands, les embauches se maintiennent mieux que dans l’industrie. Le secteur qui remporte la palme, c’est l’hébergement qui a su beaucoup investir après Covid. Les segments de programmation et conseils informatiques ou d’ingénierie progressent aussi.

LAL : La construction est « le secteur le plus malade », selon votre étude…

J.-M. L. : C’est le secteur le plus atomisé et qui compte beaucoup en Nouvelle-Aquitaine et dans les Landes. Pour 2024, les carnets de commandes atteignent un point bas historique (- 5,8 % dans le gros œuvre). Les seules choses qui tiennent à peu près sont les marchés publics (collèges, lycées, hôpitaux) dans lesquels les collectivités locales continuent à investir. Un point à noter dans ce domaine, les chefs d’entreprise préfèrent garder leurs personnels compétents que de licencier, et font le dos rond.

LAL : Dans ce contexte plutôt morose, que diriez-vous aux étudiants du Campus Landes présents aujourd’hui ?

J.-M. L. : Les Landes sont un département dynamique où tous les secteurs sont représentés, le tourisme, l’industrie, la chimie, le bois, l’agroalimentaire… Ce contexte apporte une certaine résilience car quand les choses vont mal, il y a toujours un secteur qui rattrape l’autre. On retrouve ce constat dans les taux de défaillances : les jeunes entreprises qui s’installent ici ont deux fois plus de chances d’exister entre trois et cinq ans que dans les départements voisins. Cela tient aussi à la solidarité départementale, de la chambre de commerce et d’industrie à la chambre de métiers et de l’artisanat ou aux associations comme le Medef qui sont là pour accompagner les chefs d’entreprise. Je dirai donc à ces jeunes étudiants que les Landes sont une terre bénie pour créer son activité.

LANDES EN CHIFFRES

Lors de l’assemblée générale de la chambre de commerce et d’industrie des Landes, le 19 février, le président François Lafitte a expliqué que le chiffre d’affaires (CA) de la Maison Landes n’a pas progressé en 2023 par rapport à 2022. « Il a même régressé pour notre économie de production. Agriculture, construction et industries ont ainsi perdu plus de 750 millions d’euros comparativement à 2022, soit environ – 10 %. » À l’inverse, les activités du tertiaire progressent et parfois de manière notable comme dans le tourisme (+ 13 %) ou les services aux entreprises (+ 20 %). « Le point d’alerte concerne les exportations qui constituaient un relais de croissance important pour nos PMI. Ce n’est plus le cas. Les statistiques des trois premiers trimestres de 2023 font état d’une baisse très nette de 18 %, deux fois plus prononcée qu’en Nouvelle-Aquitaine », avec un net ralentissement dans les secteurs de la chimie (- 35 %) et du bois papier (- 20 %).

Globalement, au second semestre 2023, près d’un tiers des entreprises ont vu leur CA régresser, les carnets de commandes sont orientés à la baisse pour 43 % des entreprises (18 % il y a un an), et seules 43,5 % d’entre elles déclarent avoir investi sur cette période.