La France, 8e pays producteur de bières en Europe, selon le syndicat des Brasseurs de France, est aujourd’hui le pays qui compte le plus de brasseries en Europe : plus de 2 500 contre une cinquantaine il y a 20 ans, devant le Royaume-Uni (1 810) et l’Allemagne (1 500), et leur nombre continue d’augmenter. Juste retour des choses pour l’Hexagone qui dénombrait 3 500 brasseries artisanales à la fin du XIXe siècle.
Côté sites de production, la première région est l ’Auvergne-Rhône-Alpes (368 brasseries), suivie de la Nouvelle-Aquitaine (244), tandis que la région Grand-Est, avec plus de 50 % de la production française, confirme sa position de leader en volumes.
LE GOÛT ET LA DÉCOUVERTE
Dans les Landes, avec leur Séquère, née en 2012 à Dax, avant de déménager à Seignosse, les frères Bourdillas font figure de pionniers dans ce phénomène de microbrasseries venu des États-Unis. La côte sud dont les vagues attirent des anglo-saxons fans de houblon du monde entier, est devenue un temple de la bière artisanale, et les marques s’y sont multipliées, de Rosny (Seignosse) à Cath’ (Capbreton) ou encore Hapchot (Hossegor), aujourd’hui propriété du Béarnais Ogeu.
En remontant vers le nord, La Petite Landaise, lancée en 2017 à Lit-et-Mixe, se déguste, entre autres, dans son propre bar à Saint-Julien-en-Born, avec espace ouvert sur sa petite production (100 à 150 hectolitres annuels).
« Le mouvement de bières artisanales a pris partout. Ça demande un peu de pédagogie car la culture bière n’était pas très répandue dans le Sud-Ouest, mais il y a une vraie culture des bonnes choses ici et donc il y a de la demande sur des saveurs, des goûts, de la découverte », explique son fondateur, Jean-François Pottier. Pour cet été, lui et son fils qui vient de finir ses études en zythologie (bière), en ont sorti une spéciale brassée à l’hibiscus.
L’augmentation faramineuse du coût de l’énergie, des cartons, du verre… fait qu’on rogne sur nos marges
BAPTISTE et Jean-François Pottier de la Petite Landaise © Patxi Beltzaiz
Complexité de l’époque : le prix des matières premières qui s’envole. « L’activité continue à progresser, mais tout a augmenté, le malt, les cartons, les étiquettes, les bouteilles en verre (passées de 16 à 25 centimes en 33 centilitres). Alors, on fait des économies à droite, à gauche, pour être plus rentable sans vendre son âme. Notre côté haut de gamme nous sauve », assure-t-il. Même son de cloche à la brasserie Bruel à Tarnos, avec ses bières élevées sous bois de chêne ou d’acacia français : « L’augmentation faramineuse du coût de l ’énergie, des cartons, du verre… fait qu’on rogne sur nos marges, mais on s’en sort par la différence et la qualité », assure le gérant John Bruel qui produit 300 hectolitres annuels à destination de quelque 150 revendeurs (épicerie, cavistes, fromagers…) des Landes et du Pays basque et certains jusqu’en Auvergne et la Côte d’Azur.
CLIENTÈLE LOCALE ET RÉSEAU NATIONAL
Mis à part Micromégas à Saint-Sever, placée en liquidation judiciaire cet hiver, les microbrasseries landaises tiennent le coup. Certaines sont même en pleine stratégie de développement, à l’image de Kanaha Beer (40 en hawaïen) et sa quinzaine de bières à l’anglo-saxonne conçues à Biscarrosse. « On grossit, on est sur une augmentation à deux chiffres avec une clientèle en grande partie locale et un réseau qui se développe depuis un an et demi au national », fait valoir Alexandra Bacqué, la cogérante depuis une dizaine d’années et ex-cadre financier dans de grands groupes : « On a aujourd’hui besoin de s’agrandir, mais c’est très compliqué de trouver des terrains, il y a beaucoup de freins au développement. C’est toujours frustrant de ne pas pouvoir aller plus vite. »
BOUTEILLES PERSONNALISÉES
Certains brasseurs landais comme La Petite Landaise, la Brasserie de Lugazaut ou Brasserie Naturelle des Landes (BNL), proposent de personnaliser les étiquettes de leurs bouteilles pour des événements spécifiques. À L’Expériment’Halle à Dax, des ateliers de fabrication sont organisés pour repartir avec ses propres bières, aux recettes adaptées à ses goûts.
BIÈRE TRUCK LANDES CONDENSÉ DE BIÈRES D’ICI
Pour sa deuxième saison, Pierre Daniel-Calonne, basé à Ychoux, vient d’acheter un deuxième Combi Volkswagen mini-bar, d’où il tire à la pression huit bières landaises, en se posant là où il n’y a pas de café, de places de villages en mariages, soirées entre amis ou séminaires. Avec l’objectif de passer son chiffre d’affaires de 100 000 à 200 000 euros. Cet ancien spécialiste de coopération internationale dans des pays en développement qui vient de s’associer à un ancien expatrié aussi, Yoan Boisselier, a rejoint au printemps 2022 le petit réseau « Bière truck », monté par un ami, près de Tours (Indre-et-Loire). Il en a fait un point de rencontre des meilleures bières locales : Brasserie de Lugazaut (Vielle-Soubiran), Brasserie Naturelle des Landes (Lit-et-Mixe), Brasserie du Born (Mimizan), Kanaha Beer (Biscarrosse), La Séquère et Rosny (Seignosse), Cath’ (Capbreton), Brasserie de Bahus (Bahus-Soubiran) et L’Escource et sa fameuse mousse à l’aiguille de pins.
« APÉROS-VILLAGE »
Avec leurs deux Combi où se vend aussi de la limonade, ils ont déjà 10 à 12 dates réservées par semaine cet été, dont beaucoup de marchés gourmands et des événements chez des particuliers ou en lien avec des mairies de villages ou associations de commerçants, de Biscarrosse-bourg à Saint-Geours-de-Maremne ou Liposthey. Ses « apéros-village », il les propose pratiquement toute l’année, car l’ambition de Pierre Daniel-Calonne, a toujours été de « ne pas viser uniquement les touristes, mais de créer une pérennité avec les habitants pour des moments de convivialité lors de rendez-vous réguliers répondant aux besoins et aux envies. »
PIERRE DANIEL-CALONNE @J. D.
