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Un Macs de défis : interview avec Pierre Froustey, président de la communauté de communes Maremne Adour Côte Sud (Macs)

La communauté de communes Maremne Adour Côte Sud (Macs) vient de définir son projet de territoire pour 2035. Tour d’horizon avec son président, Pierre Froustey, sur les principaux enjeux pour la collectivité.

Pierre Froustey, Président de la communauté de communes Maremne Adour Côte Sud (Macs) et maire de Vieux-Boucau

Pierre Froustey, Président de la communauté de communes Maremne Adour Côte Sud (Macs) et maire de Vieux-Boucau © JPEG Studios

Les Annonces Landaises : Pourquoi un projet de territoire pour la communauté de communes Maremne Adour Côte Sud qui disposait déjà d’une charte territoriale et d’une feuille de route ?

Pierre Froustey : Compte tenu du renouvellement de 60 % des délégués communautaires lors des élections municipales de 2020, nous avons souhaité, à partir des documents déjà réalisés, formaliser une ambition partagée, pour nous mettre d’accord sur des valeurs, définir des actions prioritaires, mettre en adéquation nos ambitions et nos moyens, et surtout formaliser une gouvernance différente et partagée, en nous appuyant sur la compétence communale. Issu d’une large concertation avec les élus, les services et les habitants, ce document d’intention évolutif fixe les orientations qui devront être déclinées en actions : nous appuyer sur nos héritages géographiques, économiques et culturels pour innover ; respecter nos ressources et viser la sobriété dans le cadre de la feuille de route de transition écologique régionale Néo Terra, en parvenant à une neutralité carbone à l’horizon 2050. Enfin et sur- tout, répondre aux besoins des habitants avec une logique de proximité.

LAL : Quelles sont les filières qui portent aujourd’hui l’essor économique de Macs où la démographie a progressé en moyenne de 2 % par an entre 2008 et 2019 ?

P.F. : Macs présente la spécificité de couvrir à la fois le littoral avec le tourisme qui génère 400 millions d’euros de recettes par an, le rétro-littoral et le secteur intérieur. Cette zone rurale fait partie de notre richesse avec des produits gastronomiques de qualité et une filière agroalimentaire significative, dont Labeyrie est l’un des navires amiraux, à Saint-Geours-de-Maremne. L’objectif est de les compléter par une activité en circuit court, en créant un nouveau pôle culinaire et une légumerie sur la zone d’activité Atlantisud.

Le territoire connaît une forte dynamique, avec des zones d’activité saturées dès leur commercialisation

Le secteur du bâtiment, très présent, est porté par une croissance démographique quatre fois supérieure à la moyenne nationale. Nous cherchons à le qualifier au sein du technopôle Domolandes dédié à la construction durable et aux matériaux biosourcés, avec des entreprises innovantes comme Materr’up et Ouatéco.

Et la filière surf, spécialisée sur la logistique et la matière grise après les difficultés rencontrées par les majors, représente encore aujourd’hui 1 200 emplois.

LAL : Sur l’industrie du surf, où en est le projet de pépinière d’entreprises prévue dans la zone d’activité Pédebert, à Soorts-Hossegor ?

P.F. : Le développement de la zone d’activité Pédebert dans son ensemble représente 7 millions d’euros d’investissements publics, en plus des investissements privés. Ce projet de pépinière en fait partie pour 3 millions d’euros. D’ici trois ans, elle doit proposer à la fois un hôtel d’entreprises pour donner aux créatifs de la filière l’opportunité de se lancer en minimisant les risques, et un point d’animation de la zone rénovée.

Pierre Froustey, Président de la communauté de communes Maremne Adour Côte Sud (Macs) et maire de Vieux-Boucau

Pierre Froustey, Président de la communauté de communes Maremne Adour Côte Sud (Macs) et maire de Vieux-Boucau © JPEG Studios

LAL : Quelles perspectives pour les 30 zones d’activité de Maremne Adour Côte Sud ?

P.F. : Le territoire connaît une forte dynamique, avec des zones d’activité saturées dès leur commercialisation. Sur Atlantisud, par exemple, le syndicat mixte gestionnaire a vendu autant de lots en 18 mois qu’au cours des 12 dernières années. Les entreprises qui s’implantent relèvent d’une économie diversifiée, aussi bien résidentielle qu’industrielle. Nous devons aujourd’hui définir une stratégie dans leur sélection, avec des critères qui englobent leur ancienneté, la mise en valeur d’une filière, la faculté d’innovation, de développement et les perspectives d’emplois créés. Ce sont autant de sujets que nous aborderons avec les entreprises dans le cadre du futur club des acteurs économiques.

En lien avec les entreprises, nous avons identifié trois freins essentiels au recrutement : le logement, la mobilité et la formation

LAL : Sur Macs, comme ailleurs, de nombreuses entreprises se heurtent aujourd’hui à des difficultés de recrutement. La collectivité peut-elle contribuer à lever ces freins ?

P.F. : Les tensions en matière de recrutement portent aujourd’hui en particulier sur les métiers du numérique, de l’hôtellerie-restauration et de la construction. En lien avec les entreprises, nous avons identifié trois freins essentiels relevant des compétences de l’intercommunalité : le logement, la mobilité et la formation. La création d’un service de développement territorial dès septembre au sein de la collectivité, doit permettre de ne plus traiter ces questions en silo, mais de manière globale.

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LAL : Comment abordez-vous la question du logement sur un territoire où les prix de l’immobilier continuent de flamber ?

P.F. : Pour accueillir les nouveaux habitants, une multiplicité de logements sont en construction, avec des répercussions sur l’étalement urbain. Or, en matière de développement durable, la communauté de communes s’inscrit dans la démarche zéro artificialisation nette à l’horizon 2050*, même si elle ne s’appliquera pas de manière uniforme sur toutes les communes. L’enjeu va être de disposer de l’habitat qui réponde aux besoins sans consommer plus d’espace que de raison.

L’enjeu va être de disposer de l’habitat qui réponde aux besoins sans consommer plus d’espace que de raison

Nous sommes également confrontés à la spéculation sur l’immobilier entre raréfaction et envolée des prix. Pour tenter d’y remédier, nous envisageons en particulier la mobilisation d’outils comme le Bail réel solidaire qui consiste à louer le foncier pour rendre abordable l’accession à la propriété. Les expériences menées à Labenne, Saint-Vincent-de-Tyrosse et Capbreton pourraient être généralisées.

Plus globalement, il faudra redéfinir les formes urbaines, aussi bien dans les zones d’activité que sur l’habitat – en revenant notamment sur le modèle de la maison individuelle dotée d’un terrain clôturé – et évoluer vers la mutualisation des espaces. Dans la zone d’activité de Tosse, par exemple, nous travaillons sur un seul lot permettant d’accueillir deux ou trois fois plus d’entreprises que dans les zones traditionnelles. Nous portons également le projet d’une zone d’activité expérimentale à énergie positive, vertueuse en termes de consommation d’espace, de production et de partage de l’énergie, et de synergie entre les entreprises. Ces approches disruptives impliquent néanmoins un changement des mentalités.

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LAL : Des solutions pour le problème récurrent du logement des saisonniers ?

P.F. : Mon avis est que la solution existe dans un schéma entre les communes, la communauté de communes et les entreprises. Il ne faut se priver d’aucune idée et chercher des solutions multiples comme l’utilisation des internats, des offres de co-living, la création d’aires spécifiques, l’habitat modulaire et mobile ou la création d’un foyer des jeunes travailleurs. Les entreprises sont aujourd’hui prêtes à investir dans le logement de leurs saisonniers, à condition de leur assurer une continuité. Aux collectivités d’impulser le mouvement avec des actions expérimentales avant de les diffuser sur l’ensemble du territoire. C’est dans l’expérimentation que les bonnes pratiques pourront être partagées.

Sur le logement saisonnier, la solution existe dans un schéma entre les communes, la communauté de communes et les entreprises

LAL : Quelles sont les ambitions du territoire en matière de mobilité ?

P.F. : L’étude menée sur les flux routiers, en 2016, avait mis en évidence que si l’évolution démographique et l’utilisation de la voiture en autosolisme se poursuivaient au même rythme, le réseau de voirie actuel serait, dès 2026, autant saturé l’hiver qu’il l’est aujourd’hui l’été. Nos ambitions : réduire d’un tiers l’utilisation de la voiture, multiplier par 10 celle des transports en commun, par cinq celle du vélo et par deux la marche à pied. Pour parvenir à ces résultats, il faudra notamment accompagner les communes dans l’aménagement des pistes cyclables en centre-ville, développer le transport à la demande dans les communes de l’intérieur ou explorer une solution de transport collectif rapide ou à haute qualité de service, investir dans un pôle d’échange multimodal à Saint-Vincent-de-Tyrosse qui représente un budget de 7 millions d’euros, cofinancé par l’État, la Région et le Département. Nous allons également interroger les entrepreneurs sur les plans de mobilité inter-entreprises ; étudier avec eux d’où viennent les salariés et à quelle heure ils travaillent pour favoriser le covoiturage et adapter l’offre de transport en commun. Là encore, il sera essentiel que l’ensemble des acteurs s’approprie ces mesures qui vont parfois impliquer de fermer des voies ouvertes à la circulation pour privilégier le transport en commun.

Un campus universitaire entre Saint-Geours-de-Maremne, Soustons-Plage et Capbreton

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LAL : Quels projets en matière de formation ?

P.F. : Pour assurer le développement économique, nous devons avoir un lien plus étroit entre la formation post-bac, la formation continue et les besoins des entreprises. En complémentarité avec l’offre des territoires voisins de Dax et du Pays basque, nous prévoyons un campus de formation éclaté pour embarquer le territoire dans sa globalité. Nous avons déjà plusieurs retours positifs de la part d’établissements universitaires, d’organismes de formation publics ou privés sur les métiers du cycle et du surf à Soustons, sur les formations commerciales, les techniques managériales ou le numérique à Capbreton. À Domolandes, la démarche démarre avec l’université Toulouse Capitole, autour d’une chaire dédiée à l’intelligence artificielle, notamment sur la construction à usage social, qui va aussi contribuer à amplifier la recherche et le développement.

Nos ambitions en termes de mobilité : réduire d’un tiers l’utilisation de la voiture, multiplier par 10 celle des transports en commun, par cinq celle du vélo et par deux la marche à pied

LAL : Globalement, comment projetez-vous Macs dans 10 ans ?

P.F. : Un territoire dont la qualité d’accueil et de vie soit améliorée. Avec un tourisme plus durable, équilibré entre le littoral et l’intérieur, qui conjugue attractivité et protection de l’environnement. Aussi dynamique qu’aujourd’hui, mais mieux identifié comme porteur de recherche et d’innovation. Avec une activité économique qui sera tournée vers la modernité, tout en conservant une identité culturelle forte, aussi bien au niveau architectural qu’événementiel et en termes de savoir-faire. L’enjeu aujourd’hui est de transformer nos ressources en produits vertueux.

MACS EN CHIFFRES

23 communes

68 368 habitants

+ 1 221 habitants par an entre 2008 et 2019, soit 2 % par an

+ 30 000 actifs en 5 ans

80 % des actifs occupés sont salariés

+ de 3 300 artisans, commerçants, chefs entreprise, soit près de 14,5 % des emplois totaux

+ de 6 000 entreprises dans la sphère commerciale

Tourisme : 198 000 lits, soit 45 % de la capacité touristique des Landes

10 millions de nuitées par an