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Plaidoyer pour les avocats Cathy Garbez, bâtonnière du barreau de Mont-de-Marsan

L’avocate expérimentée, Cathy Garbez, a été élue par ses pairs bâtonnière du barreau de Mont-de-Marsan en janvier dernier. Son rôle : être le porte-parole des avocats. Rencontre.

Cathy Garbez, bâtonnière du barreau de Mont-de-Marsan © H. R

Cathy Garbez, bâtonnière du barreau de Mont-de-Marsan © H. R

Les Annonces Landaises : Comment êtes-vous devenue avocate à Mont-de-Marsan ?

Cathy Garbez : Je suis originaire du Nord et j’ai fait l’école d’avocats de Bordeaux. J’ai commencé à exercer à Bordeaux. Nous étions très nombreux, et je suis arrivée à Mont-de-Marsan, il y a 19 ans, pour des raisons personnelles. À l’époque, j’étais le 37e avocat du barreau. Aujourd’hui, nous sommes 73.

LAL : Le nombre d’avocats est-il géré par l’Ordre ?

C.G. : Non, c’est différent des pharmaciens ou des notaires. Pour les avocats, il suffit d’être titulaire d’un certificat d’aptitude à la profession et de remplir des conditions tenant aux locaux, au casier judiciaire vierge et à la nationalité. Si ces conditions sont remplies, le Conseil de l’Ordre valide l’inscription au barreau.

LAL : Il peut donc y avoir un risque de saturation ?

C.G. : Il est de plus en plus difficile de se faire une place. Les avocats sont souvent perçus comme des nantis. La réalité est bien différente. Si certains ont des revenus confortables, d’autres doivent se contenter de peu.

LAL : Comment un avocat doit-il procéder pour élargir sa clientèle ?

C.G. : C’est souvent une histoire de contacts acquis au fur et à mesure des années d’exercice. Le bouche-à-oreille est à mon sens déterminant. Les permanences pénales avec un avocat commis d’office offrent également des ouvertures. Le statut de collaborateur est aussi un moyen de développer une clientèle.

LAL : Auriez-vous un conseil à prodiguer ?

C.G. : Je me garderai bien de tout conseil. Je peux juste vous dire comment je procède à titre personnel. Il me semble important, dès le premier rendez-vous, d’être transparent sur les chances de gagner ou pas et sur les honoraires. Après, c’est la qualité de la relation humaine qui fait la différence. Je pratique beaucoup en droit de la famille –même si je ne suis pas titulaire du certificat délivré par le Conseil national des barreaux–, alors vous imaginez bien que pour les divorces, les successions ou les adoptions, la capacité d’empathie et d’écoute est essentielle. Si un client est en confiance, il reviendra éventuellement pour d’autres dossiers et recommandera l’avocat à son entourage.

Cathy Garbez, bâtonnière du barreau de Mont-de-Marsan

Cathy Garbez, bâtonnière du barreau de Mont-de-Marsan © H. R

LAL : Les tarifs pratiqués sont parfois perçus comme excessifs.

C.G. : Les honoraires sont libres. Chaque avocat fait ce qui lui semble être le mieux, en fonction du temps passé, de la complexité du dossier et de son expérience. Certaines procédures peuvent être compliquées et justifier facturations en proportion. Il une réalité économique. La part des gens le comprenne bien. Un cabinet, c’est un secrétariat, éventuellement un ou collaborateurs avec des charges et des cotisations lourdes.

Si certains avocats ont des revenus confortables, d’autres doivent se contenter de peu

LAL : Les avocats ont également la réputation de toujours dire à leurs clients qu’ils vont gagner et quand arrive le jugement la déception est parfois grande.

C.G. : C’est une idée reçue. En même temps, il faut bien que l’avocat croie en son travail. C’est vrai que les jugements ne font pas toujours plaisir. Même si les magistrats disent le droit, il y a parfois un décalage entre morale et justice. Certains clients sont déçus alors qu’ils croyaient être dans leur bon droit.

LAL : Comment voyez-vous l’avenir de la profession ?

C.G. : Je suis optimiste, même si la place de l’avocat est remise en cause. Le recours à la médiation ou aux mesures de règlement amiable des litiges est une bonne chose, mais il faut que l’avocat soit présent, pour conseiller utilement son client. Nous avons un vrai rôle à tenir dans cette déjudiciarisation des procédures.

LAL : Pensez-vous qu’un jour les avocats pourront être remplacés par l’intelligence artificielle ?

C.G. : Jamais rien ne remplacera la relation ni l’intelligence humaine en matière de justice.

LAL : Vous avez été élue bâtonnière pour deux ans. Quel est votre rôle ?

C.G. : Oui, j’ai été élue par mes pairs. J’en suis très fière, même si je dois avouer que les candidatures ne se bousculaient pas. C’est une charge importante qu’il faut assumer en plus du quotidien de son cabinet. Le bâtonnier, en binôme avec son successeur les six derniers mois de son bâtonnat, préside le Conseil de l’Ordre des avocats composé de 12 membres élus pour trois ans. Il est le lien entre les différents confrères, la Conférence des bâtonniers, les magistrats de la juridiction et les chefs de cour. Il a également en charge la résolution des litiges entre les avocats et leurs clients. En cas de différends, ceux-ci peuvent nous saisir par courrier.

Les avocats ont un vrai rôle à tenir dans la déjudiciarisation des procédures

LAL : Quel type de relation entretenez-vous avec les magistrats et greffiers de Mont-de-Marsan ?

C.G. : Je crois pouvoir dire qu’elles sont excellentes. Nous avons parfois des divergences, mais chacun sait y remédier avec souplesse dans l’intérêt du justiciable.

LAL : Le nouveau palais de justice de Mont-de-Marsan a-t-il simplifié le fonctionnement ?

C.G. : Nous avons, les juges et greffiers certainement, mais nous aussi les avocats, gagné en efficacité. Nous n’avons plus à nous déplacer sur quatre lieux différents et, dans une petite juridiction comme la nôtre, l’accès aux juges et greffiers est plus facile.

barreau de mot de marsan

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LAL : Même fluidité avec le niveau national ?

C.G. : Là, c’est plus compliqué. Les États généraux de la justice n’ont pas donné la parole aux avocats. Les procédures civiles sont trop complexes, les réformes trop nombreuses, et n’ont pas grand-chose à voir avec la réalité des justiciables qui en pâtissent. C’est dommage.

LAL : Barre, barreau, bâtonnier, la psychanalyse pourrait s’amuser de toutes ces appellations ?

C. G. : Peut-être. Moi, j’y vois un attachement à la droiture qui doit guider le quotidien des avocats.