Couverture du journal du 20/04/2024 Le nouveau magazine

La Nouvelle Miroiterie Landaise : En toute transparence

La Miroiterie Landaise, reprise en 2017 par un groupe de 12 amis investisseurs qui croyaient en elle alors qu’elle était en dépôt de bilan, a redressé la barre. Après avoir doublé en quatre ans son chiffre d’affaires, elle intègre le dispositif « Usine du futur » pour poursuivre son développement. Visite avec Claude Pernin, son président directeur général.

Claude PERNIN PDG de La Nouvelle Miroiterie Landaise © Hubert Raffini

Les Annonces Landaises : Le logo de la Nouvelle Miroiterie Landaise reflète-t-il l’histoire de cette entreprise landaise emblématique, créée en 1968 ?

Claude Pernin : Quand nous avons racheté l’entreprise en 2017, symboliquement nous avons souhaité garder la base du logo historique en y ajoutant l’adjectif « nouvelle » et le double visage de Janus. Sans l’ancienne Miroiterie il n’y aurait pas eu la nouvelle.

Les Annonces Landaises : Pourquoi Janus ?

Claude Pernin : Parce qu’il est le dieu romain des commencements et des fins, des choix, du passage et des portes. Important chez nous ! Un visage est tourné vers le passé, l’autre vers l’avenir. Nous avons à la fois souhaité qu’il y ait une rupture, notamment pour les salariés, et une continuité pour les clients qui gardaient une excellente image de l’entreprise.

Nous sommes sortis du fatalisme, nous avons redonné du sens aux compétences des salariés

Les Annonces Landaises : Quel souvenir gardez-vous de l’époque où vous avez envisagé cette reprise ?

 

Claude Pernin : Une vraie détermination. Rien ne me prédestinait à cela. La Miroiterie Landaise qui venait de s’endetter et connaissait de grosses pertes de compétences avait été mise sous vigilance par le tribunal de commerce de Dax. Il y avait alors 200 salariés et sept sites de production (du nord au sud : Langon, Biscarrosse, Mont-de-Marsan, Soustons, Dax, Bayonne, et Pau-Lescar). L’entreprise jouissait d’une bonne image, mais on parlait de liquidation et de plan social. La personne qui avait été nommée par le tribunal de commerce m’a demandé de lui venir en aide pour créer un réseau.

La nouvelle miroiterie landaise

Effectif : 70

Implantations : Mont-de-Marsan, Dax, Soustons, La Teste-de-Buch

Chiffre d’affaires 2021 : 10 millions d’euros

Principales activités : 

– Miroiterie : découpe à façon de verre et de miroir
– Menuiserie (aluminium & PVC),
– Protection solaire : stores, pergolas, voiles d’ombrage, brise-soleil…
– Véranda
– Fermetures : portails, portes de garage, volets…
– SAV et entretien des équipements

Tous ces produits sont proposés en fourniture seule ou en fourniture et pose. Elle représente notamment Technal (menuiserie aluminium) et Bubendorff (volets roulants).

Nous avons proposé de recentrer l’activité pour nous orienter vers une petite industrialisation adaptée aux marchés

Usine Nouvelle Miroiterie Landaise

© Hubert Raffini

 

Les Annonces Landaises : Pourquoi s’est-il adressé à vous ?

Claude Pernin : Un peu le fruit du hasard. À l’époque, j’étais directeur de la concession Volkswagen à Dax et je m’occupais du club de rugby. C’est ainsi que j’ai rencontré le mandataire du tribunal qui m’a demandé de créer un groupe de repreneurs potentiels. Après quelques recherches, on s’est retrouvé une douzaine de copains, chefs d’entreprise, à vouloir prendre de la participation dans l’entreprise. Parmi eux, Jean-Pierre Bastiat de Dax, Bernard Sabathier qui avait déjà racheté le groupe, Jacques Raffy de Castets, Pierre Bouet de Clermont ou le groupe Sipa de Mont-de-Marsan.

Les Annonces Landaises : Il ne s’agissait alors que d’un ballon d’oxygène ?

Claude Pernin : L’idée était d’apporter une somme suffisamment crédible aux yeux du tribunal de commerce pour faire en sorte que l’entreprise puisse rentrer dans un plan de continuation. En contrepartie, le dirigeant de l’époque devait élaborer un plan avec un travail de prospective, mais il n’était pas très motivé. L’affaire allait capoter. Nous nous demandions à quoi pourraient bien servir les sommes que nous avions mobilisées. Souhaitant soutenir les entreprises locales et au nom de notre camaraderie, nous avons choisi de nous engager complètement. Nous avons laissé arriver le dépôt de bilan inéluctable et nous avons fait la démonstration de notre capacité de reprise.

Les Annonces Landaises : Vous avez pris les commandes ?

 

Claude Pernin : Très vite, comme j’avais piloté le dossier, j’ai laissé tomber mon job dans l’automobile et j’ai analysé les marchés, monté un business plan, rencontré les salariés, les banques et présenté un projet. Le tribunal de commerce l’a entériné et le 2 janvier 2017 on a ouvert la boîte.

Les Annonces Landaises : Quels étaient les points essentiels de votre projet ?

 

Claude Pernin : En 2017, au moment du dépôt de bilan, la situation financière de l’entreprise ne reflétait pas la réalité. On était -toutes proportions gardées- dans le syndrome de Frigidaire devenu synonyme de réfrigérateur. Une grosse notoriété, de vrais savoir-faire, mais une structuration désuète qui engendrait des coûts prohibitifs et donc une perte de compétitivité. Nous avons proposé de recentrer l’activité pour nous orienter vers une petite industrialisation adaptée aux marchés. Aujourd’hui, Mont-de-Marsan fabrique et les agences de Dax, Soustons et La Teste-de-Buch sont chargées du commercial et des installations. Nous avons redémarré avec 50 salariés. Le management participatif des salariés est également un point fort de notre démarche.

Historique

1968 : Création de l’entreprise par Claude Latapy (architecte montois)

1977 : Création d’une agence à Soustons

1981 : Ouverture de l’agence de Dax

1996 : Bernard Sabathier rachète le groupe

2017 : Création de la Nouvelle Miroiterie Landaise par Claude Pernin

2018 : Ouverture d’une antenne à La Teste-de-Buch

Les Annonces Landaises : Quelle est votre conception des ressources humaines ?

 

Claude Pernin : Je suis attaché à la notion de bienveillance individuelle. Avant, trouver un boulot était une priorité. Aujourd’hui, il y a deux vies : le professionnel et le personnel. Il faut reconsidérer la place du travail dans la vie. Pour cela, je veille à ce que chacun des collaborateurs se sente impliqué par quelque chose qui l’intéresse. Le travail doit apporter une reconnaissance personnelle, familiale, sociale. Tout travail doit être valorisé. C’est souvent au travail que l’on rencontre sa compagne ou son compagnon et c’est là que l’on acquiert un statut social.

Chaque année, nous traduisons la situation de l’entreprise et notre marge de progrès par un mot symbolique

Les Annonces Landaises : Comment mobilisez-vous vos équipes ?

Claude Pernin : Chaque année, nous traduisons la situation de l’entreprise et notre marge de progrès par un mot symbolique. La première année, c’était « Janus », pour lier passé et avenir. La deuxième année, nous avons choisi tenségrité, un terme d’architecture qui évoque la faculté d’une structure à se stabiliser par le jeu des forces. Ainsi, un système comportant un ensemble de composants divers peut trouver un état d’équilibre stable. Pour notre troisième année d’existence, nous avons travaillé sur l’acrasie, un mot grec qui désigne le fait de vouloir une chose et de faire son contraire. On sait que l’on fonce vers l’abîme, mais on continue d’appuyer sur l’accélérateur. Un peu comme la procrastination. En réfléchissant à ce concept, on facilite le passage à l’action. L’an dernier, nous avons évoqué la sérendipité, le don de faire, par hasard et sagacité, une découverte inattendue et de savoir en tirer parti. Pour l’année à venir, on travaillera certainement sur la notion de résilience.

Claude Pernin : Entrepreneur autodidacte

Originaire du centre de la France, Claude Pernin, 58 ans, est issu du monde de l’automobile. À 18 ans, il est embauché chez Renault pour laver des voitures et intègre trois mois plus tard le service commercial. Il reste 23 ans au sein de la marque au losange et suit de 1993 à 2001 une formation interne pour valider un master en stratégie et gestion. Il devient par la suite directeur de la concession Volkswagen à Dax.

Les Annonces Landaises : En référence à la situation inédite créée par la pandémie ?

Claude Pernin : Oui, depuis 1945, rien ne venait perturber le fonctionnement des entreprises. Aujourd’hui, on rencontre des phénomènes conjoncturels auxquels il faut s’adapter : les cyberattaques, la pandémie et les pénuries de matières premières. Les écoles de commerce vont être obligées d’enseigner l’adaptation à l’imprévisible. Le réchauffement climatique nous réserve également quelques impondérables.

Les Annonces Landaises : Malgré ces écueils, êtes-vous satisfait de vos cinq premières années d’existence ?

Claude Pernin : Nous sommes très satisfaits de notre parcours. On savait qu’il y avait un potentiel et nous avons relevé les challenges qui étaient essentiels pour nous. Nous sommes sortis du fatalisme, nous avons redonné du sens aux compétences des salariés. Nous sommes aujourd’hui 70, et notre activité commerciale est en pleine progression. La première année, notre chiffre d’affaires s’élevait à 4 millions d’euros. En 2020, avec la pandémie nous avons dû mettre de côté des projets importants qui étaient au feu et on a perdu 25 % de notre chiffre d’affaires, mais en 2021, on atteindra les 10 millions d’euros de chiffre d’affaires.

Les Annonces Landaises : Ces résultats vous donnent-ils des ailes ?

Claude Pernin : Notre ambition est de devenir acteur sur un territoire beaucoup plus grand que le seul département des Landes. Nous voulons externaliser notre modèle de petite industrie vers d’autres villes de Nouvelle-Aquitaine. La Nouvelle Miroiterie landaise deviendrait alors la Nouvelle Miroiterie ou NML comme la Biscuiterie Nantaise est devenue BN, avec ses fameux chocos.

Nous voulons externaliser notre modèle de petite industrie vers d’autres villes de Nouvelle-Aquitaine

Claude Pernin : « Je retourne à l’école usine du futur »

Comme 40 autres PME aquitaines candidates, la Nouvelle Miroiterie Landaise vient d’intégrer le programme « Usine du futur » animé par les services de la Région Nouvelle Aquitaine, avec le soutien de l’Agence de développement et d’innovation (ADI).

Objectif : accompagner les entreprises vers l’excellence opérationnelle et les soutenir lors de leur transition vers l’usine numérique, connectée et durable. « Deux jours tous les deux mois, je vais suivre des cours à Kedge, la Business School de Bordeaux et des consultants experts viendront auditer l’entreprise. Ce sera pour nous l’occasion de scanner toute notre organisation pour construire une nouvelle gouvernance, d’élaborer le meilleur maillage territorial et d’affiner notre responsabilité sociétale des entreprises (RSE) qui sera une manière d’intégrer les préoccupations sociales et environnementales aux activités commerciales pour pérenniser une entreprise compétitive, numérique et durable », explique Claude Pernin.