Un salon feutré, quelques notes de jazz, un café noir fumant et quelques douceurs sucrées font oublier la pluie battante et le ciel désespérément gris qui malmènent la Chalosse. En ce jour de décembre, les Prés d’Eugénie ont revêtu leurs couleurs d’hiver. Michel Guérard, la voix douce et le regard pétillant, nous ouvre les portes de son domaine d’Eugénie-les-Bains pour parler de cuisine, de créativité, de transmission, de développement durable, et bien évidemment des Landes.
Les Annonces Landaises : Depuis deux ans, en raison de la crise sanitaire, le contexte est compliqué pour le secteur de la restauration. Comment gérez-vous cette situation exceptionnelle ?
Michel Guérard : On fait avec. Avec les contraintes, avec les confinements, avec les interdictions et les limitations. Quel autre choix a-t-on ? On s’est habitué à une différence de rythme qui nous oblige à penser différemment, notamment pour ne pas s’ennuyer. Depuis deux ans, nous en avons toutefois profité pour effectuer des modifications et des travaux. Dans une maison comme la nôtre, on ne peut pas rester constamment sur la même mise en scène. Il est important de proposer des choses nouvelles pour plaire aux clients, pour les surprendre et les ravir. C’est un métier où il est primordial de savoir se renouveler. D’autant que la concurrence s’intensifie ces dernières années. Il faut que nous soyons en capacité de maintenir notre excellence.
LAL : Beaucoup de chefs déclarent puiser leur inspiration dans les voyages. Est-ce aussi votre cas ?
M. G. : J’ai toujours puisé mon inspiration de manière insolite. Elle est souvent liée à une image, à un parfum qui fait éclore en moi l’envie de cuisiner un plat qui, je l’espère, va surprendre. Parfois cela fonctionne et d’autre fois c’est raté. Pour moi, un plat réussi est un plat qui, par exemple, fait dire à un cuisinier qui y goûterait : « Mince, j’aurais dû y penser ». Et pour les clients, l’idée est de les surprendre pour qu’ils conservent ensuite un souvenir de ce moment. Mais attention, ce n’est pas parce qu’on fait de l’insolite que c’est forcément bon. Il faut que ce soit goûteux. Goûteux et gourmand. C’est la base pour pouvoir se régaler.

Les Prés d’Eugénie © Yoan Chevojon
LAL : Pendant les confinements, les Français se sont mis (ou remis) à cuisiner. Qu’est-ce que cela vous inspire ?
M.G. : Je trouve cela charmant. Cela prouve notamment que nous autres, Français, nous avons besoin de la cuisine et qu’elle a un rôle important dans chaque famille. Aujourd’hui, on rencontre de plus en plus d’amateurs qui sont érudits en matière de cuisine. Ils aiment échanger, discuter et c’est un réel plaisir pour moi. Le développement des émissions de cuisine à la télévision a beaucoup contribué à ce phénomène.
Aujourd’hui, on rencontre de plus en pl…