Couverture du journal du 30/05/2025 Le nouveau magazine

Le pain au naturel

Ils sont de plus en plus nombreux à retravailler le levain naturel dans les Landes, pour du bon pain à l’ancienne. Rencontre avec ces boulangers, artisans du temps long, dans un marché en développement.

Boulanger

Stéphane Chauvard, à Castets © Bernard Dugros

Dans ses grandes armoires réfrigérées, derrière le comptoir du Pain d’ici à Castets, poussent tranquillement, dans de grandes bassines, les levains de seigle, de petit épeautre, de blé et de lait pour la brioche. De farine en eau tiédie, de bactéries en bulles et fermentation, Stéphane Chauvard bichonne ses levains, les travaille au quotidien pour leur donner du caractère. Avec ses analyses de farine, ses pétrins à bras plongeants pour moins oxyder la pâte et garder au mieux la qualité nutritionnelle, ses mélangeurs doseurs avec refroidisseur d’eau pour obtenir exactement la température qu’on veut, le pain ne se fait ici jamais au doigt mouillé, mais de façon quasi-scientifique. Deux jours sont nécessaires avant de mettre en cuisson ces miches qui se conserveront ensuite plusieurs jours. « On peut dire qu’on fait de la biochimie pour réaliser du pain à l’ancienne », dit le néo-boulanger, tombé dans les farines bio au fil des hasards de la vie.

DE MADAGASCAR À CASTETS

Originaire des Yvelines, il intègre après le baccalauréat, l’European Business School à Paris. Pour un stage de direction l’été, le voilà au VVF des Estagnots à Seignosse où il avait déjà découvert le surf plus tôt. Le jeune homme préfère abandonner son école de commerce pour devenir animateur sportif à Vielle-Saint-Girons et faire les saisons, montagne l’hiver, plage l’été. « La région m’a séduit, le surf, l’ambiance… ». Mais le goût du voyage l’amène à Madagascar où il développe des projets de commerce équitable (ateliers bijouterie à base de graines avec des handicapés, vannerie avec des femmes rizicultrices) ainsi qu’une société textile de tee-shirts décorés de baobabs, lémuriens et taxi-brousse. Le coup d’État de 2009 mettra à mal ses finances, et après avoir travaillé dans une ONG et une association de broderie à la main avec des femmes en précarité, il finit par rentrer en France avec sa famille, ses trois enfants étant nés sur l’île de l’Océan indien.

Boulanger

Au Pain d’ici, à Castets, les salariés ont choisi leur formule de temps de travail, alternant des semaines à 4 ou 5 jours et plus © Bernard Dugros

Le cadre landais est alors une évidence. Vendeur de fenêtres à Bénesse-Maremne pendant six mois sans en vendre une (!), le hasard lui fait rencontrer, lors d’une soirée, un boulanger de Herm, fabricant de pain au levain. « J’ai repris toutes les données chiffrées, le coût de la farine, les marges, tout le modèle économique, ça ne me semblait pas bête. En plus, déjà à Madagascar, je bricolais mon pain.

De farine en eau tiédie, de bactéries en bulles et fermentation, ils bichonnent les levains au quotidien pour donner du caractère au pain

Mais j’avais zéro capital à investir », se rappelle Stéphane Chauvard qui se lance en 2016 grâce au « plan 500 000 formations » de François Hollande pour les demandeurs d’emploi, et passe son CAP boulangerie en adulte au Centre de formation des apprentis (CFA) de Mont-de-Marsan. Durant son stage à Saint-Vincent-de-Tyrosse…