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La quête de sens au travail : un défi pour les organisations

La crise Covid a contribué à amplifier la quête de sens au travail. Prépondérante dans la société actuelle, elle devient un véritable enjeu pour l’attractivité des entreprises et la fidélisation des collaborateurs. Quelles solutions pour répondre à ces nouvelles attentes ?

Lisa SARRADE, coach professionnelle certifiée, coach en entreprise, coach d'équipe, à Magescq travail

Lisa SARRADE, coach professionnelle certifiée, coach en entreprise, coach d'équipe, à Magescq © Bernard Dugros

Parmi les grands sujets de ces dernières années il y a… la quête de sens, et la quête de sens au travail. Ce thème est développé au début du XXe siècle lorsque l’Organisation internationale du travail (OIT) parle pour la première fois des enjeux de justice sociale liés au bien-être physique et moral des travailleurs. Il est alors question de savoir si la croissance économique peut s’accompagner de progrès sur le plan humain.

De nombreuses avancées ont été réalisées sur le sujet, mais, avec la crise sanitaire Covid, la question du sens au travail a pris une nouvelle importance, les priorités ont été reconsidérées.

Avant la crise, un Français sur 10 considérait que le sens de son travail pouvait être la cause d’un certain mal-être. En 2020, un Français sur deux disait réfléchir sur le sens de son travail, voire de son utilité depuis le début de la pandémie.

La revalorisation de certains métiers, autrefois mal perçus comme les enseignants, les métiers du « care », et la distinction entre les métiers dits « essentiels » et les autres, ont poussé les Français à se questionner sur leur propre métier et ont ainsi créé une véritable remise en question chez certains.

QUE SIGNIFIE LA QUÊTE DE SENS ?

La quête de sens est une notion assez floue car elle est intrinsèquement subjective. Elle est à distinguer de la qualité de vie au travail ou du bien-être salarié car elle revêt des caractéristiques encore plus larges.

La quête de sens au travail se définit sous les dimensions de « sens du travail » et « sens au travail », c’est-à-dire, comment effectuer un travail qui a du sens dans un milieu qui en a également. Cette notion englobe à la fois la signification de ce que l’on fait, la direction dans laquelle on va et les sensations que l’on éprouve.

Ces notions suffisamment larges permettent à chacun d’y mettre ce qu’il souhaite : certains vont rechercher un métier qui leur assure un certain niveau de vie, d’autres vont plutôt chercher à atteindre un équilibre vie professionnelle/vie personnelle qui leur convient. Certains auront besoin d’œuvrer pour un projet qui leur semble vertueux, d’autres prioriseront la qualité des relations entretenues avec les équipes et la direction.

En parallèle de cet intérêt nouveau pour la quête de sens, est apparue la notion de brown-out, en complément d’autres mots-clés liés à la souffrance au travail comme le burn-out (épuisement physique, émotionnel et mental dû au travail intense), ou encore le bore-out (épuisement professionnel causé par l’ennui).

Le brown-out désigne en anglais une panne de courant, un « manque de jus » ; le salarié est démotivé, a la sensation que le travail réalisé est inutile, sans intérêt, voire à l’opposé de sa volonté ou de ses valeurs.

Ce phénomène est représentatif du manque d’épanouissement des collaborateurs et illustre bien l’importance nouvelle de la quête de sens au travail.

Dans la quête de sens, l’important n’est pas tant le métier exercé, mais bien le fait de savoir ce que l’on vient y chercher, pourquoi on l’exerce.

Le travail n’est plus simplement une source de revenus, il devient également un terrain d’épanouissement, d’accomplissement.

Et si la crise Covid n’est pas à l’origine de ce phénomène, elle a bel et bien contribué à l’amplifier.

LE SENS AU TRAVAIL : UNE FIN EN SOI OU UN CAP ?

La définition et l’importance du sens sont à la fois personnelles et générationnelles.

Si les jeunes diplômés recherchent en priorité un travail stimulant, en phase avec leurs valeurs et servant l’intérêt général, ceci n’est pour autant pas une finalité. En effet, pour beaucoup, il s’agit également d’enjeux plus intimes comme l’évolution de sa carrière ou son développement personnel.

Il s’agit là certainement plus d’un moteur dont la puissance et la direction évoluent selon les individus…

QUELS ENJEUX POUR LES ENTREPRISES ?

À qui revient la responsabilité de donner du sens au travail ? Est-ce le rôle de l’entreprise de tenir compte de cette recherche d’impact et de développement personnel ?

Si les obligations formelles de l’entreprise restent d’assurer à ses salariés un revenu stable et des conditions de travail décentes, intégrer ce nouveau rapport au travail dans sa stratégie d’emploi et dans l’accompagnement des équipes est devenu un réel enjeu pour l’attractivité et la fidélisation.

Des collaborateurs motivés, épanouis, sont des collaborateurs efficaces, créant une dynamique vertueuse pour la performance et la rentabilité de l’entreprise.

Par ailleurs, une entreprise qui se préoccupe de donner du sens à ses salariés, contribue par la même occasion à les motiver.

Plus encore, cela améliore la marque employeur et permet de recruter les nouveaux talents beaucoup plus facilement, notamment auprès de la jeune génération, particulièrement attentive à ces questions (bien qu’ils soient maintenant loin d’être les seuls à s’en préoccuper).

Des atouts indéniables dans une période où le turnover est plus que jamais d’actualité.

Les entreprises doivent donc répondre à la quête de sens de leurs salariés et futurs collaborateurs pour assurer leur rentabilité. Un employé satisfait est efficace et donc productif. La mise en place d’une démarche de qualité de vie au travail s’avère, de ce fait, primordiale.

COMMENT DONNER DU SENS AU TRAVAIL ET MOTIVER LES SALARIÉS ?

La quête de sens d’un salarié se jouant à plusieurs niveaux, l’entreprise peut influer sur diverses dimensions de l’emploi pour les motiver : les missions exécutées, l’équilibre entre les domaines de vie, le niveau de rémunération, les conditions de travail matérielles, relationnelles, managériales, le sentiment d’utilité et d’appartenance pour l’entreprise, les dynamiques d’évolution…

Pour cela, il est important de fournir aux collaborateurs un environnement de travail sécurisant.

Par exemple, exposer de manière claire les missions et objectifs de l’entreprise permet aux collaborateurs de se les approprier et les retranscrire dans leur poste.

Comprendre son impact dans l’entreprise est engageant pour tout salarié.

Par ailleurs, l’optimisation du travail par la définition précise des tâches et du contour de chaque poste doit permettre de mobiliser efficacement les capacités et compétences spécifiques des salariés.

L’écoute, le partage, la communication hiérarchique, interservices, l’inclusion dans des projets, la formation… Autant de moyens pertinents qui contribuent à l’épanouissement au travail.

De nombreuses autres mesures applicables facilement et rapidement peuvent s’inscrire dans une démarche à dimension plus humaine afin de répondre aux différentes attentes des collaborateurs en quête de sens au travail.

Ce qui reste cependant primordial pour donner du sens au travail, c’est de prendre en considération chaque collaborateur individuellement, pour ce qu’il est. Savoir révéler son potentiel, ses forces et ses domaines de compétences pour en faire un allié unique et engagé.

Une des clés réside dans l’intention avec laquelle dirigeants, managers, accompagnent les salariés. L’intention passe d’une part par la connaissance de soi, de ses moteurs, afin de donner du sens à ce qui est fait. D’autre part, l’intention passe par l’investissement dans la connaissance réelle des collaborateurs, de leur vision, de leurs moteurs.

Mieux se connaître pour mieux se comprendre et avancer ensemble.

Une démarche plus centrée sur l’humain et collaborative pour plus de responsabilisation, autonomisation, efficacité et épanouissement, au profit de la cohésion et de la performance de l’entreprise.

Parce qu’à mon sens, la performance ne peut être célébrée que si elle est partagée.

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