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Conditions d’emploi du salarié : le contrat de travail n’est pas fait que de contraintes !

La rédaction d’un contrat de travail est un exercice toujours délicat que ce soit en qualité d’employeur avec la volonté, fréquente, d’y mentionner un maximum de choses, ou en qualité de conseil, avec le souhait d’obtenir un juste équilibre entre ce qu’il est nécessaire d’y figer, ce qu’il est utile d’y intégrer pour plus de souplesse et ce qu’il est préférable de ne pas y aborder.

contrat

DAVID BRIVOIS EUPHRASIE LUPI © Patxi BELTZAIZ

La distinction entre changement des conditions de travail et modification du contrat de travail :

La maîtrise de l’exercice nécessite de distinguer ce que seront, ultérieurement, des changements de conditions de travail et des modifications du contrat de travail.

Les premiers relèvent du pouvoir de direction de l’employeur et peuvent ainsi être mis œuvre de manière strictement unilatérale alors que les secondes nécessiteront l’accord écrit et préalable du salarié concerné.

Il est commun de parler de piliers du contrat de travail lorsqu’il est question des fonctions du salarié, de sa classification, de sa rémunération, de sa durée du travail ou encore de son secteur d’activité.

Les termes ont leur importance et il ne faudra pas confondre :

– Fonction / classification (intitulé du poste et coefficient, par exemple) et tâches (descriptif de ce qui compose la fonction), ces dernières relevant du strict pouvoir de direction ;

– Rémunération contractuelle et rémunération variable unilatérale, la seconde pouvant évoluer de manière strictement unilatérale dès lors que les formalismes ont été correctement rédigés, y compris si cela est susceptible de faire évoluer à la hausse ou à la baisse la rémunération du salarié concerné ;

– Durée du travail (la quantité de travail) et horaires de travail (la répartition de la quantité dans la semaine et au sein de la journée), les seconds relevant en principe du strict pouvoir de direction, à moins qu’ils n’aient été figés dans le contrat (comme cela est obligatoire pour un salarié à temps partiel ou par erreur rédactionnelle pour un temps complet) ;

– Lieu de travail (l’adresse précise d’emploi) et secteur géographique, le second étant le seul à avoir été contractualisé si le contrat ne contient aucune disposition spécifique, de sorte qu’il est possible d’imposer une mobilité proche, à tout salarié.

Un exercice d’équilibre

Ces quelques illustrations permettent de comprendre que l’exercice contractuel est un exercice d’équilibre. Un détail excessif pourrait conduire à figer la relation de travail ; l’adage « graver dans le marbre » prend alors tout son sens.

À ce titre, la démarche consistant à contractualiser les horaires de travail d’un salarié à temps complet est des plus fréquentes. À l’inverse, une formulation habile des clauses contractuelles permettra de faire glisser un domaine habituellement contractuel (et donc nécessitant l’accord écrit et préalable du salarié) vers le pouvoir de direction de l’employeur.

En matière de rémunération, le contrat de travail pourra, par exemple, renvoyer vers un plan de rémunération variable dont il aura été contractuellement convenu qu’il sera unilatéralement fixé chaque année par l’employeur. Les objectifs pourront ainsi évoluer librement et en dehors de toute contrainte liée au recueil de l’accord préalable et écrit du salarié.[1]

Il pourra encore avoir été envisagé une mobilité géographique supérieure au secteur géographique commun (le plus souvent de l’ordre de 40 km ou 40 minutes de trajet selon la densité du trafic routier local) par une clause contractuelle spécifique qui permettra de l’étendre au-delà (souvent jusqu’aux départements limitrophes, parfois sur la France métropolitaine, selon les fonctions et la mobilité acceptable pour tel ou tel type de poste)[2] ;

Le contrat de travail peut ainsi se révéler être un véritable carcan lorsqu’il est subi alors qu’il constitue un formidable outil d’optimisation lorsqu’il est maîtrisé.

L’émergence d’une nouvelle catégorie permettant de mieux appréhender la situation des salariés protégés :

Il est utile de préciser que les salariés protégés (membres des institutions représentatives du personnel – IRP – notamment) se voient appliquer un régime qui leur est spécifique puisque la jurisprudence leur accorde le privilège de ne pouvoir se faire imposer aucune modification de leur contrat de travail (comme tous les autres salariés), mais, plus encore, aucun changement de leurs conditions de travail[3].

Sans qu’il ne soit question de discriminer sur le fondement de ce mandat, ni encore d’en perturber le libre exercice par son titulaire, l’entreprise se doit de pouvoir maintenir un bon fonctionnement.

Un détail excessif pourrait conduire à figer la relation de travail ; l’adage « graver dans le marbre » prend alors tout son sens

Clause de mobilité géographique

Il est d’ailleurs d’usage de considérer que les élus disposent d’une liberté plus prononcée que le reste du personnel. L’employeur ne peut ainsi pas s’opposer a priori à l’utilisation des heures de délégation.

Ces dernières doivent toutefois être utilisées conformément à leur objet, tout en gardant du coin de l’œil l’idée de maintenir une bonne organisation de l’entreprise.

Il est ici encore question d’équilibre.

Cette protection, bien entendu nécessaire au bon exercice de leur mandat par les IRP, peut parfois conduire à des impasses opérationnelles : certains ajustements pourtant nécessaires à la bonne organisation de l’entreprise peuvent être rendus impossibles si le salarié protégé s’y oppose, y compris lorsqu’il est question d’un simple changement de ses conditions de travail.

La Cour de cassation a toutefois rendu un arrêt récent[4] qui laisse entrevoir davantage de flexibilité dans l’exécution du contrat de travail des salariés protégés.

La Cour de cassation intègre ainsi l’idée qu’au-delà des notions de modification du contrat de travail et de changement des conditions de travail décrites plus haut et nécessitant l’accord préalable et écrit du salarié, il existe désormais des situations qui correspondent à l’exercice normal du contrat de travail.

En l’espèce, il était question d’une mobilité géographique à la fois temporaire, exceptionnelle, conforme à la clause de mobilité géographique prévue au contrat de travail du salarié et annoncée suffisamment en amont pour être légitime. Le salarié protégé avait d’ailleurs déjà réalisé de telles missions éloignées et d’autres salariés de l’entreprise étaient également concernés.

En l’état actuel du droit et en application du principe rappelé supra interdisant à l’employeur d’imposer au salarié protégé un simple changement de ses conditions de travail, il aurait été impossible de faire application de cette clause de mobilité géographique.

Selon la Cour de cassation, désormais, il est ainsi possible de dépasser la dichotomie décrite plus haut et d’estimer, y compris pour les salariés protégés, que le pouvoir de direction de l’employeur lui permet d’exécuter pleinement ce qui avait été prévu à l’origine dans le contrat de travail.

Cette décision est salutaire et elle relève du bon sens mais les fondements juridiques manquaient jusqu’à aujourd’hui pour imposer ce qui avait été convenu contractuellement lorsqu’un mandat d’IRP venait se surajouter ensuite.

L’outil existe désormais !

Il est ainsi plus important que jamais d’identifier ce qui relève de la stricte exécution du contrat de travail, du changement des conditions de travail ou de la modification de contrat de travail pour faire correctement évoluer les conditions d’emploi du salarié.

Le contrat de travail constitue un formidable outil d’optimisation lorsqu’il est maîtrisé

Une matinée dédiée

Le cabinet Fidal Dax, en partenariat avec le Medef des Landes, organise une matinale le 9 janvier 2025, de 8 h 30 à 10 h 00 sur le thème du contrat de travail.

L’accès est libre, y compris pour les entreprises non adhérentes au Medef et l’évènement se déroulera sur Dax dans un lieu encore à déterminer.

Pour plus de précisions et pour s’inscrire, contacter le Cabinet Fidal Dax via isabelle.ducos@fidal.com

 

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