Couverture du journal du 20/04/2024 Le nouveau magazine

Trashboard, le skate en carton recyclé

En empilant des lamelles de cartons partant à la poubelle, François Jaubert, a réussi à fabriquer des planches plus légères et aussi solides que les classiques. Et ce globe-trotter, installé à Hossegor, espère bien capitaliser sur sa technologie pour vendre ses skates via des grosses compagnies du secteur.

Trashboard, skate

© Trashboard

Un jour devant chez lui alors qu’il habitait au Portugal, près des vagues de Peniche, trois à quatre gros cartons de vélos sont restés des jours dans la rue. L’idée a germé d’en faire quelque chose : « Ce n’était pas possible de laisser ça là. Qu’est-ce qu’on pouvait en faire ? », se rappelle François Jaubert.

INSPIRÉ DE LA CHAISE EN CARTON DE FRANK GEHRY

À l’époque, c’est une planche de surf que cet ex-étudiant en architecture design fabrique, en s’inspirant de la Wiggle Side Chair, la chaise en carton créée dans les années 1970 par l’architecte Frank Gehry, mais pour en faire, lui, un objet flottant. « J’ai suivi mon instinct pour créer la board en coupant des lamelles de cartons empilés horizontalement, en les collant entre elles, avant une couche de résine pour la rendre étanche. » Quinze prototypes sont créés par ce grand voyageur qui a aussi habité en Norvège, en Espagne, en Suisse, aux Pays-Bas : « À chaque fois que je faisais une planche, je faisais un skate avec les chutes… »

Sa planche de surf est repérée en Californie au concours d’innovation Upcycle Contest de la marque Vissla à San Clemente, et a même les honneurs d’une exposition au musée du Design de Barcelone en 2016. Pas mal de casse et autres soucis sur ses planches de surf recyclées, le renvoient vers des études d’architecture navale et ingénierie marine à Brest pour apprendre à travailler les matériaux composites. « Là, j’ai compris que le skate serait le meilleur produit que je pourrai sortir avec ma technologie », fait valoir le skater de toujours, qui a fait ses débuts sur quatre roulettes à Toulon, plus jeune. « Christophe Seiller, mon mentor de l’Eurosima [où il est cluster manager depuis 15 ans, NDLR], m’a dit : « Viens par ici, on va t’aider à développer ton truc ! » Il m’a mis en contact et en réseau avec tout l’écosystème d’ici. »

Trashboard, skate

© Trashboard

VERS UNE MICRO-USINE DE PRODUCTION

Après un an et demi de recherche et développement dans son atelier basé à Anglet, sa planche, 30 % plus légère qu’un skate classique (1,2 kg), est désormais aboutie avec un brevet déposé, en attendant la phase de vente, prévue début 2023, pour laquelle il espère embaucher. Après avoir réussi à lever quelques fonds, il compte monter en même temps – idéalement sur Hossegor – sa « première micro-usine », avec l’objectif de fabriquer 1 500 skates l’an prochain. En circuit-court. « Un skate d’habitude fait quasiment le tour du monde, ici tout sera fait localement », mais plus que d’écologie et de réduction du bilan carbone, c’est « le côté trash, l’image du carton dans le garage, de la poubelle qui me plaît, ça colle parfaitement à l’image du skate, qui reste dans une contre-culture rebelle, où on n’a besoin de rien d’autre que de sa planche. »

François Jaubert, fondateur de Trashboard, skate

François Jaubert, fondateur de Trashboard © J. D.

Quant à la durée de vie de son skate en carton : « Ce n’est pas bon pour le business, mais c’est bon pour les tortues et l’environnement ! », plaisante François Jaubert, qui garantit sa solidité. Son objectif d’ici deux ou trois ans est de « réussir à collaborer avec des marques, plutôt que de vendre tout seul. Le skate, ça a toujours été une industrie de sous-traitance. Mon but est de capitaliser sur ma technologie et faire évoluer ma boîte avec d’autres produits », prévoit celui qui travaille déjà à des skis en carton recyclé, dans un monde où la livraison à domicile démultiplie la production de cartons d’emballage.