Couverture du journal du 19/03/2025 Le nouveau magazine

Tearing Waves : chirurgienne des combinaisons de surf

À Soustons, My-Lane est devenue spécialiste du néoprène. Elle répare les combinaisons de surf pour prolonger leur durée de vie et limiter la surconsommation de ce matériau non recyclable.

Tearing Waves

My-Lane répare les combinaisons de surf pour éviter la surconsommation de néoprène. © Tearing Waves

Passer des paillettes, du cachemire et de la soie au néoprène, c’est le virage à 180 degrés qu’a pris My-Lane en 2020. Costumière de métier, la trentenaire avait créé son entreprise à Soustons un an plus tôt.  « Mais avec le Covid, plein de choses se sont arrêtées dans mon activité et j’ai dû penser à une reconversion. Je n’étais pas inquiète. Dans une entreprise de couture, on est capable de faire beaucoup de choses ! »

Justement, durant le premier confinement, un ami lui demande si elle peut réparer les combinaisons de surf de son club. « J’étais un peu sceptique, mais je suis curieuse. Ça fait 14 ans que je couds. Je me suis dit que c’était le moment de me tester sur le néoprène. »

La découverte est totale. D’autant qu’à cette époque, « il n’y avait rien à ce sujet sur internet ». Mais son expérience et son savoir-faire lui permettent de transformer l’essai. Sous ses doigts de fée, les combinaisons usées ou déchirées retrouvent une seconde vie.

« Mon ami en a parlé à ses clients et à chaque réparation, je n’avais que des bons retours. Le bouche-à-oreille a fait le reste. » Rapidement, avec Tearing Waves (les vagues déchirantes, en français), elle devient une référence incontournable dans le monde du surf qu’elle ne pratique pourtant pas. « Ce n’est pas mon univers. Moi, je viens du monde du spectacle. Mais l’enjeu environnemental m’a motivée à continuer dans cette voie. »

Bonus réparation

Le néoprène est en effet une matière impossible à recycler. In fine, il sera enfoui ou brûlé. « C’est donc très important de faire durer son matériel pour ne pas en surconsommer. » Malheureusement, ce n’était pas la règle jusqu’alors. « Avec tous les magasins d’usine dans la région, les gens sont habitués aux prix bas et achètent beaucoup de combinaisons. À leur décharge, peu de marques proposent un service de réparation. Jusqu’à maintenant, au moindre accroc, leur seule solution était d’acheter une nouvelle combinaison… »

L’alternative qu’elle propose permet de prolonger leur durée de vie de deux saisons en moyenne. Et aussi de faire pas mal d’économies… Alors qu’une combinaison neuve coûte entre 300 euros et 500 euros, une réparation est facturée entre 40 et 80 euros. En prime, la clientèle de Tearing Waves peut profiter du bonus réparation. « Je suis la première réparatrice labellisée sur le néoprène, depuis juillet 2024. Mes clients bénéficient ainsi d’une réduction de 10 euros sur leur facture. »

Mais tous n’ont pas attendu ce bonus. En quatre ans, elle a servi plus de 800 clients et réparé plus de 2 000 combinaisons. Depuis octobre dernier, elle a d’ailleurs embauché une apprentie pour l’accompagner dans le développement de son activité.

Tearing Waves

La clientèle de Tearing Waves peut profiter du bonus réparation pour laquelle l’entreprise est labellisée depuis juillet 2024. © Tearing Waves

Matériel médical

Les marques ont rapidement repéré My-Lane. Quiksilver a notamment fait appel à elle, l’année dernière, dans le cadre d’un projet de surcycling. « En partenariat avec Oceneo, la marque a conçu des lunettes de soleil à partir de combinaisons de surf usagées. Et elle m’a demandé de confectionner les étuis dans la même matière. J’ai trouvé le projet très intéressant par son ancrage local. J’ai donc réalisé 140 pochettes… et j’ai adoré faire ça ! En prime, cette commande m’a permis d’investir dans une nouvelle machine à coudre ultra-performante qui me permet de faire d’encore meilleures réparations. » À part ce projet, My-Lane ne souhaite toutefois pas réaliser de confection. « Ma démarche consiste à sauver du matériel, pas à en créer encore plus. Je veux me concentrer sur la réparation. »

La seule exception qu’elle pourrait faire serait pour créer du matériel médical. « J’ai été diagnostiquée autiste en 2021. Une chose qui m’aide face à ce handicap, c’est de porter un gilet de compression. Mais ceux du marché ne répondent pas parfaitement à mes besoins. Je vais donc créer un prototype en néoprène pour moi. Et si l’essai est concluant, peut-être qu’un jour, je créerai une gamme de gilets de compréhension made in France. J’y pense depuis un an et demi. C’est le seul produit que j’accepterai de réaliser, parce que c’est important pour la santé. »