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Environnement : La Leyre à la loupe

Grâce à un collectif de citoyens, l’association La Pagaie sauvage participe à une étude de l’université de Bordeaux sur la contamination nanoplastique du bassin versant de la Leyre.

© La Pagaie Sauvage

Fin janvier, le premier Rés’eau de suivi citoyen de microplastiques sur le bassin versant de la Leyre a été créé. Initié par l’association La Pagaie sauvage (Anglet) et accompagné par le parc naturel régional des Landes de Gascogne, il est composé de 22 membres (agriculteur, pisciculteur, kayakistes, riverains, pêcheurs, animateurs, naturalistes…) dont l’objectif est d’effectuer des relevés réguliers sur le bassin versant, et ainsi d’accroître la surveillance citoyenne autour des pollutions plastiques et microplastiques.

« À l’origine, La Pagaie sauvage était un blog de balades en canoë, explique Lise Durantou, chargée de mission de l’association. En parcourant les cours d’eau, nous nous sommes rendu compte de tous les déchets plastiques qu’ils charriaient. En 2017, nous avons donc décidé de nous engager pour la sauvegarde de nos rivières en créant un laboratoire citoyen pour l’amélioration des connaissances sur la pollution microplastique. » La démarche ne laisse pas indifférents le monde scientifique et les institutions publiques. Dès 2019, elle reçoit le soutien de l’université de Pau et des Pays de l’Adour et de l’Agence de l’eau Adour-Garonne.

La même année, naît le projet Plascote (Plastics and associated contaminants in the Leyre-Plastiques et contaminants associés dans la Leyre). Porté par l’équipe de recherche de Magalie Beaudrimont au laboratoire EPOC de l’université de Bordeaux, en partenariat avec La Pagaie sauvage, et soutenu par le Laboratoire d’excellence, il vise à proposer une étude complète de la contamination nanoplastique du bassin versant de la Leyre, une rivière qui prend sa source à Sabres et se jette dans le bassin d’Arcachon (Gironde) après un parcours de 116 kilomètres.

©Nathalie Leboullenger – La Petite Fougère

Santé publique

Les plastiques représentent une part de la pollution aquatique grandissante et encore méconnue. « S’il est difficile de les quantifier, il apparaît que 70 % des plastiques présents dans les océans proviennent de l’apport des fleuves. » Or si elle n’est pas toujours visible (les microplastiques sont des particules de plastique dont la taille est inférieure à 5 millimètres, tandis que les nanoplastiques mesurent moins d’un micromètre), cette pollution n’en est pas moins dangereuse. Les plastiques libèrent en effet des substances (bisphénols, phtalates…) qui ont un impact sur le vivant et la santé humaine (par le biais de la consommation de produits marins). « On sait que certaines d’entre elles affectent les glandes endocrines et modifient le fonctionnement hormonal. Cela peut avoir des conséquences sur la fertilité, les cycles de sommeil, le stress… »

Outre une analyse de l’état du milieu, Plascote vise donc à observer les effets de l’ingestion de nanoplastiques sur les organismes vivants. C’est une palourde invasive, la cordicula flumiea, qui sert de cobaye. Les résultats de ce travail mené par Adeline Arini à la station marine d’Arcachon, sont attendus en septembre.

Mais l’observatoire citoyen perdurera bien au-delà de la fin du programme de recherche. « Notre volonté est d’adapter ce modèle ailleurs pour mobiliser et sensibiliser la population et les pouvoirs publics aux dangers des micro et des nanoplastiques », affirme Lise Durantou. Au travers de conférences, formations, expositions et publications, l’association souhaite alerter tout un chacun sur le rôle qu’il a à jouer dans la limitation de cette pollution invisible. Car une grande part provient de la sphère domestique via les résidus de cosmétiques ou les vidanges de machines à laver…

Devenir citoyen défenseur et engagé

Le laboratoire citoyen créé par La Pagaie sauvage permet à tous les usagers et riverains des cours d’eau de réaliser des prélèvements de teneur microplastique en eau douce. Toute la procédure est expliquée sur le site de l’association Laboratoire citoyen. Une fois envoyés à l’association, les prélèvements sont analysés et les résultats sont mis en ligne pour constituer une base de données des pollutions plastiques. Elle permet ensuite d’émettre des préconisations de diminutions des rejets constatés sur les différents territoires.