La promesse de Dassé Construction, pionnière de la construction bois modulaire industrialisée, s’est matérialisée en mai dernier sur une parcelle située à Gourbera, dans l’agglomération dacquoise, mise à disposition par Alliance Forêt bois, première coopérative forestière de France. 256 arbres ont été repiqués en partenariat également avec le fonds de dotation Plantons pour l’avenir. Chênes-lièges, arbousiers, pins parasols, poiriers communs et alisiers torminaux composent une nouvelle haie bocagère. Pensée pour la biodiversité, elle offre un habitat aux oiseaux insectivores, en contribuant à l’humidité ambiante et en servant de barrière naturelle contre les incendies. Une plantation qui correspond exactement aux 256 m² de bureaux construits par l’entreprise de Castets pour la maison de santé de Châteauneuf-Val-de-Bargis, dans la Nièvre, et qui vise à compenser les émissions de CO₂ émises par le chantier.
Le pari d’un jeune dirigeant
« Je veux que chaque bâtiment que nous livrons laisse une empreinte utile, pas une empreinte carbone. Je suis convaincu que l’on peut bâtir vite, bien et proprement », martèle Pierre Pipo, qui a repris, en 2017, l’entreprise créée en 1954 par son grand-père René Dassé qui fut aussi président de l’US Dax pendant 20 ans et vice-président de la Fédération française de rugby.
Le parcours du PDG de 35 ans n’était pourtant pas tracé. Ingénieur formé à Toulouse, Pierre Pipo pilotait des chantiers pour le compte d’une grande entreprise générale de bâtiment quand Dassé Construction a traversé une période difficile. « Après le décès de mon grand-père en 2003, mon père – son gendre – assurait des fonctions non opérationnelles, représentant les actionnaires de l’entreprise, propriété de ma mère et de ma tante. Pendant 20 ans, quatre directeurs se sont succédé avec plus ou moins de réussite et l’entreprise était en grande difficulté. J’ai donc fait le choix de relever le défi et j’ai intégré Dassé Construction. D’abord comme directeur travaux, puis comme responsable des études et enfin comme directeur commercial, avant de passer à la direction générale. J’avais la volonté de donner une seconde chance à l’entreprise familiale notamment par rapport aux employés, dont certains avaient été embauchés par mon grand-père », témoigne-t-il. Malgré tout, le dirigeant doit se résoudre en 2019 à mettre en place un plan social qui se traduit par le départ de 12 salariés sur 54.

Bâtiment du syndicat mixte Eaux Marensin Maremne Adour à Saint-Vincent-de-Tyrosse © Dassé
Retour aux fondamentaux
Sa stratégie passe par un retour sur les commandes publiques et les salles de classe – les fondamentaux qui ont fait la réussite de Dassé Construction – et un repositionnement sur des projets plus importants comme des groupes scolaires entiers, des programmes d’habitats pour les bailleurs sociaux, des bâtiments de bureaux, et des opérations combinant conception et réalisation. La récente réalisation d’un groupe scolaire maternelle et élémentaire à Bègles (Gironde) se veut un « projet exemplaire » avec des façades 100 % en bois et isolant fibre de bois, labellisé Bâtiment durable Nouvelle-Aquitaine et intégrant la géothermie.
L’entreprise collabore aussi notamment avec l’armée française sur des bâtiments modulaires bois. Après les crèches ministérielles de Cherbourg et Toulon, une nouvelle structure dont le premier mur bois a été posé cet hiver, devait s’achever cet été dans le quartier militaire de Varces-Allières-et-Risset (Isère), qui héberge l’état-major de la 27ᵉ brigade d’infanterie de montagne, le 7ᵉ bataillon de chasseurs alpins, le 93ᵉ régiment d’artillerie de montagne et la 27e compagnie de commandement et de transmissions de montagne. Avec une surface utile de 505 m², la crèche doit accueillir 30 enfants dans un environnement conçu hors site dans les ateliers Dassé.

L’avantage concurrentiel de l’entreprise : la délocalisation du chantier en usine. © Louis Piquemil
Avantage concurrentiel
Car le jeune PDG s’appuie sur l’avantage concurrentiel de l’entreprise : la délocalisation du chantier en usine (hors site). « Cette approche offre une qualité de fabrication supérieure, des conditions de travail améliorées et surtout des délais divisés par trois par rapport à la construction traditionnelle », souligne-t-il. Les panneaux industrialisés multicouches (bois et isolants) intégrant menuiseries aluminium et revêtements, produits en usine « permettent en outre une flexibilité architecturale totale tout en garantissant que les bâtiments restent démontables, transférables et réutilisables, et en conservant une excellente performance énergétique ». Autant de savoir-faire qui prennent une nouvelle dimension avec la loi Zéro artificialisation nette (ZAN) limitant la consommation foncière. « C’est vraiment notre positionnement, l’idée n’est pas seulement de construire, c’est aussi de mettre du sens dans ce que l’on fait », atteste celui qui se présente comme un fervent défenseur d’une démarche globale de décarbonation. Et son procédé de fabrication à partir de panneaux ossatures bois, classé en « filière sèche », moins consommateur d’eau que la construction classique en béton, pourrait également à terme constituer un nouvel atout face à la raréfaction de la ressource.
Je suis convaincu que l’on peut bâtir vite, bien et proprement

Le groupe scolaire maternelle élémentaire de Bègles (Gironde) a des façades 100 % en bois et isolant fibre de bois, labellisé Bâtiment durable Nouvelle-Aquitaine. © Dassé
Deux nouveaux centres d’usinage
En cinq ans, Dassé Construction a triplé son chiffre d’affaires à 30 millions d’euros (2024), avec un effectif passé à 63 collaborateurs, et notamment le recrutement d’un directeur des ressources humaines pour « davantage de transparence, de prise en compte des collaborateurs et de liens entre les équipes ». L’entreprise en profite pour investir dans le parc machines et ses infrastructures pour plus de 800 000 euros en 2024, et une aide de 139 000 euros de la région Nouvelle-Aquitaine a permis d’acheter deux centres d’usinage à Castets et de doubler la capacité de production. Accompagnée par le dispositif régional Usine du futur, elle continue à poser les bases de la transition écologique : écoconception, changement du système d’information ou mise en place de solutions photovoltaïques visant une indépendance énergétique des sites de production.
Dans ce contexte, Dassé Construction affirme déjà « anticiper les seuils carbone » des futures réglementations RE 2028 et RE 2031, « grâce à l’intégration de matériaux biosourcés et une approche globale de l’économie circulaire ». Et en étendant son savoir-faire, l’entreprise entrevoit aussi de nouvelles perspectives, jusqu’à penser s’ouvrir à l’international.
Cette approche offre des délais divisés par trois par rapport à la construction traditionnelle

En cinq ans, Dassé Construction a triplé son chiffre d’affaires à 30 millions d’euros (2024), avec un effectif passé à 63 collaborateurs. © Louis Piquemil
13 000 arbres plantés par an
Même si elle s’approvisionne à 100 % sur des filières durables, notamment de pin des Landes, la construction générant beaucoup de CO₂, Dassé Construction a décidé de planter des arbres en compensation environnementale. « Planter un arbre c’est à peu près entre 20 et 30 kg de séquestration de carbone par an », évalue, Pierre Pipo, son PDG. Avec sa croissance actuelle, Dassé Construction envisage la plantation annuelle de 13 000 arbres, selon le principe d’un arbre planté pour un mètre carré construit.