Une révolution culturelle ? À Bercy, le 14 mars dernier, une matinée d’échanges était consacrée à « entreprises et administration fiscale : une nouvelle relation de confiance ». Les équipes du ministère de l’Économie y ont présenté un dispositif composé d’outils existants et d’autres, nouveaux, qui visent à faire évoluer les relations entre les entreprises et l’administration fiscale, qui endosse le rôle d’accompagnateur. « On passe à la vitesse supérieure en institutionnalisant le fait que dans certaines situations, on part dans une confiance et une transparence réciproques », explique Bruno Parent, directeur général des finances publiques (DGFiP).
Sept mesures principales composent le dispositif : un « partenariat fiscal » pour les entreprises de taille intermédiaire (ETI) et les grandes entreprises, un « accompagnement fiscal personnalisé » pour les PME, une démarche spontanée de mise en conformité, l’examen de conformité fiscale par un tiers de confiance, l’amélioration du dialogue et des recours dans le contrôle, la mobilisation pour les rescrits, et l’appui aux entreprises à l’international, par rapport aux normes fiscales des autres États. Dans tous les cas, il s’agit d’outils dont les entreprises peuvent –ou non– se saisir.
PARTENARIAT FISCAL
Parmi les mesures nouvelles, le « partenariat fiscal » vise à établir une relation de long cours entre une entreprise et l’administration fiscale. Au sein de celle-ci, un référent dédié servira d’interlocuteur unique de l’entreprise. Une équipe de hauts fonctionnaires a déjà été identifiée au sein de la DGFiP. À propos de cette démarche, Bruno Parent évoque un « dialogue, chacun apportant sa contribution technique ». Pour les PME, Bercy a conçu un accompagnement fiscal personnalisé ». Là aussi, il s’agit de traiter les questions fiscales que ces entreprises rencontrent dans le cadre de leur activité. Spécificité, par rapport au « partenariat fiscal » des grandes entreprises, « il s’agit non seulement de résoudre une question visible, mais aussi de les aider à déceler les sujets (…). Dans les PME, souvent, c’est le chef d’entreprise ou son bras droit qui se coltine les sujets fiscaux », note Bruno Parent.
UNE FORME DE MÉFIANCE ANCIENNE
Le dispositif est ouvert à tous les types de PME. Toutefois, « nous allons faire un effort particulier pour porter ce dispositif à la connaissance des PME en forte croissance (…), les PME qui sont les futurs champions de l’équipe de France », explique Bruno Parent. Bercy vise, notamment, celles qui ont une forte dimension de recherche, ou d’internationalisation. Potentiellement confrontées à des changements structurels en raison de leur évolution, elles peuvent rencontrer des problématiques fiscales qu’elles ne connaissaient pas auparavant. Pour les PME, ce sont les directions régionales du ministère qui sont en charge du dispositif. Les équipes sont en cours de constitution. Quant aux TPE, « nous tablons plutôt sur les associations et les centres de gestion agréés, cela complète le panorama » pour les accompagner, termine Bruno Parent.
Au-delà de la proposition de dispositifs nouveaux, Bercy insiste sur un véritable changement de mentalités qui devrait également conduire à une utilisation plus intense des outils existants. « Une forme de méfiance ancienne fait que les outils de sécurisation juridique sont sous-utilisés », note Bruno Parent, prenant pour exemple le rescrit fiscal, aujourd’hui utilisé 18 000 fois par an. Ce dernier permet à l’entrepreneur de bénéficier d’une prise de position de l’administration sur l’application de textes, par rapport à sa situation particulière. Il peut ensuite opposer ce document à l’administration.
MISE EN CONFORMITÉ FISCALE
Autre exemple, le service de mise en conformité fiscale. Dans divers cas, précisément listés par Bercy, ce dispositif permet aux chefs d’entreprise de se mettre spontanément en conformité avec la législation fiscale. Cela donne la possibilité de « venir régulariser une situation tranquillement, pour pouvoir se consacrer au développement de l’entreprise (…). On sait à quoi on s’attend, les règles du jeu sont fixées à l’avance », insiste Bruno Parent. Lui se montre optimiste : « le bouquet de services nouveaux permettra de gagner la confiance » des entreprises, estime-t-il. « Inciter les PME à se rapprocher de l’administration fiscale sans crainte de contrôle ultérieur ne sera pas chose facile », a pour sa part commenté la Confédération des petites et moyennes entreprises (CPME), dans un communiqué, le même jour, saluant toutefois « une volonté affichée de privilégier l’accompagnement plutôt que la sanction ». Le Medef, a aussi souligné « une avancée majeure dans la relation entre l’administration fiscale et les entreprises, attendue de longue date ».