Couverture du journal du 01/09/2025 Le nouveau magazine

Sobriété foncière : « Changer de regard sur l’aménagement »

Comment concilier logements, équipements et activité économique avec la sobriété foncière induite par l’impérieuse nécessité de préserver les sols ? L’architecte Clémence de Selva, missionnée par le Conseil d’architecture, d’urbanisme et de l’environnement (CAUE) des Landes pour une étude sur « les hypothèses de densification respectueuse de la qualité urbaine dans les villes et villages landais », évoque les pistes pour des « projets urbains intelligents ».

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Clémence de Selva, architecte associée de l’agence bordelaise Selva et Maugin © D. R.

Les Annonces Landaises : Dans quel contexte s’inscrit votre étude sur la sobriété foncière dans les Landes ?

Clémence de Selva : Notre étude porte sur les différentes formes urbaines des villes et villages landais et doit proposer des hypothèses de densification respectueuses de la qualité urbaine. L’enjeu est de sensibiliser à la sobriété foncière, avec en filigrane la mise en œuvre de la loi Zéro artificialisation nette (ZAN) qui prévoit que d’ici 2050, tout ce qu’on artificialise devra être compensé par une renaturation quelque part. Dès 2031, il faudra avoir diminué par deux la consommation d’espaces par rapport aux 10 années précédentes. Si ces objectifs ambitieux ont suscité de nombreux débats parmi les élus locaux, loi ou pas loi, il faut aujourd’hui trouver des solutions pour consommer moins de sol.

LAL : Pourquoi la sobriété foncière s’impose-t-elle aujourd’hui ?

C. de S. : Au-delà du fait que la construction est un secteur très émetteur en gaz à effet de serre avec des matériaux qui sont des poids lourds climatiques comme le ciment et l’acier, la croissance des villes, des bourgs et des villages prospère plutôt aujourd’hui sur le mode de l’extension urbaine et consomme du sol. Or, le sol est vivant, il mettra des centaines et des milliers d’années à se reconstituer, à retrouver un fonctionnement biologique, une fertilité. Et n’oublions pas que les sols jouent aussi un rôle dans la régulation de l’eau et son infiltration naturelle. On sait que chaque fois qu’on touche un peu de sol, on contribue au changement climatique et on augmente la vulnérabilité des zones construites.

Pour continuer à développer des logements, de l’activité, des équipements, dans les bourgs, les villages comme dans les grandes villes sans consommer de la ressource sol non renouvelable, il faut porter des projets urbains intelligents qui réussissent à intensifier et densifier [voir l’encadré] l’existant en ajoutant à la fois des mètres carrés et des usages.

Chaque fois qu’on touche un peu de sol, on contribue au changement climatique

LAL : Quelles sont les pistes pour ces « projets urbains intelligents » ?

C. de S. : L’objectif est de faire changer de regard et de culture sur l’aménagement urbain. Arrêter de parler de développement mais plutôt d’aménagement ou même de ménagement, c’est-à-dire prendre soin des ressources naturelles et humaines autant que des ressources bâties dont nous héritons. À partir de situations locales, l’idée est de proposer une grille de lecture pour répertorier les « gisements invisibles » en identifiant les friches, les dents creuses, les bâti…