Couverture du journal du 06/04/2024 Le nouveau magazine

[Dossier : La construction en mutation] Le béton vert de Materrup

Avec sa première usine implantée à Saint-Geours-de-Maremne, Materrup entre dans la phase de production industrielle de son ciment à base d’argile crue. La start-up multiplie les partenariats pour ouvrir la voie de la décarbonation dans la filière ciment-béton.

Materrup

« La sobriété fait partie de notre ADN. Ici, on n’utilise pas de gaz, pas de pétrole, que de l’électricité, partiellement produite par les panneaux photovoltaïques sur le toit de l’usine » © Xavier Ges

« Cette usine concrétise la volonté sans faille de faire autrement et de faire mieux pour répondre aux enjeux sociétaux, environnementaux et énergétiques », résume Mathieu Neuville, président de Materrup, devant le bâtiment de 1 800 m2, opérationnel depuis février dernier, dans le parc d’activités Atlantisud. Pour « faire mieux », cet ingénieur en chimie et docteur en physique, passé par les centres de recherche et développement ( R& D) de Lafarge et Total, a créé fin 2018, sa start-up à Saint-Geours-de-Maremne, avec son frère jumeau Charles Neuville, directeur financier de la structure, et Manuel Mercé, docteur en chimie, ancien du CNRS et de chez Total, pour développer et commercialiser leur ciment local à base d’argile crue, donc non chauffée.

PERFORMANCES MÉCANIQUES CERTIFIÉES

Quatre ans et 35 brevets plus tard, le trio est rejoint par Julie Fort-Neuville sur la partie marketing et RSE, et réunit une équipe de 15 personnes entre R&D et production. L’entreprise peut désormais accélérer le développement de sa solution, déployable avec les outils classiques des bétonniers. Une nouvelle étape confortée, en juin dernier, par la certification par le Centre scientifique et technique du bâtiment (CSTB) de ses performances mécaniques, identiques à celles d’un ciment conventionnel. « C’est la possibilité pour nous de mettre sur le marché tous nos produits pour les aménagements extérieurs (bancs, pistes cyclables, parpaings pour murs d’enceinte, blocs de sécurisation) et prochainement pour les éléments structurels production. L’entreprise peut désormais accélérer le développement de sa solution, déployable avec les outils classiques des bétonniers. Une nouvelle étape confortée, en juin dernier, par la certification par le Centre scientifique et technique du bâtiment (CSTB) de ses performances  mécaniques, identiques à celles d’un ciment conventionnel. « C’est la possibilité pour nous de mettre sur le marché tous nos produits pour les aménagements extérieurs (bancs, pistes cyclables, parpaings pour murs d’enceinte, blocs de sécurisation) et prochainement pour les éléments structurels (dalles, escaliers et murs) », souligne Mathieu Neuville.

Materrup

© Xavier Ges

Et le marché local frémit. Dans les Landes, la commune de Sainte-Marie-de-Gosse et la communauté de communes Maremne Adour Côte Sud s’apprêtent à adopter ses dalles gazon. Le Département qui a en charge une part importante de la voirie « regarde cette innovation avec un intérêt soutenu », mentionnait son président Xavier Fortinon, le 9 septembre dernier, à l’occasion de l’inauguration officielle de l’équipement.

PARTENARIATS EN SÉRIE

Mais ce sont les partenariats avec les entreprises du bâtiment et de la filière ciment-béton en quête de solutions décarbonées et moins énergivores qui ouvrent les perspectives les plus fructueuses en termes de chiffre d’affaires pour le Landais. Le premier avec l’entreprise Duhalde BTP, à Ustaritz (Pyrénées-Atlantiques), préfabricant, spécialiste du béton prêt à l’emploi et constructeur, vise à proposer une gamme de produits communs. Avec un contrat sur trois ans, le constructeur lorrain, Demathieu Bard, déploiera progressivement sur un chantier pilote de la région bordelaise le liant mis au point par Materrup. Le tout dernier, fin août, avec le groupe Edilians, fabricant de tuiles de terre cuite, pour la fourniture d’argile crue inutilisable dans le processus de fabrication de son site de Saint-Geours-d’Auribat, qui sera valorisée en circuit court dans l’usine de Saint-Geours-de-Maremne. Et d’autres doivent être annoncés dans les prochains mois.

« CETTE USINE N’EST QU’UNE ÉTAPE »

« Cette usine n’est qu’une étape », martèle Mathieu Neuville qui compte bien multiplier en France et à l’international ces « unités de production territoriales résilientes, de la matière première jusqu’à la mise en œuvre sur les chantiers en proximité ». Autre défi à relever en partenariat avec l’école d’ingénieurs ISA BTP et l’université Pau et Pays de l’Adour avec lesquels Materrup a créé la première chaire industrielle dédiée à la construction : garder un temps d’avance en matière de R&D « sur la caractérisation des produits, l’adaptation aux différents types d’argile ou l’assemblage des différents matériaux », et bien d’autres évolutions dont les chercheurs préservent jalousement les secrets.

L’UNITÉ DE PRODUCTION EN CHIFFRES

Le premier site industriel de Materrup, doté d’une capacité annuelle de production de 50 000 tonnes de son ciment bas carbone, à Saint-Geours-de-Maremne, représente un investissement global (bâtiment et machines) de 8 millions d’euros, financé à 80 % en fonds propres par l’entreprise. Soutenue à hauteur de 600 000 euros par l’État dans le cadre du plan France relance, la construction du bâtiment de 1 800 m2 a été proposée par la Société d’aménagement des territoires et d’équipement des Landes (Satel) qui a piloté la maîtrise d’ouvrage et le financement (1,8 million d’euros).

Depuis ses débuts en 2018, sur la plateforme Domolandes, dédiée à la construction durable, Materrup qui a effectué une levée de fonds de 3 millions d’euros en 2020, a également été soutenue par la Région Nouvelle-Aquitaine, l’Adème et BPI France.